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« L’hiver fut le plus froid et le plus rude que j’aie éprouvé dans ces régions. Pendant sa durée, nous fîmes nos préparatifs pour mettre à exécution notre plan de recherches. Je pensai qu’il était de mon devoir de visiter personnellement l’île Matty, et de compléter le circuit de l’île du Roi-Guillaume ; pendant que le lieutenant Hobson se chargerait de faire des recherches sur les côtes extérieures de Boothia jusqu’au pôle magnétique, et à l’est, depuis l’île de Gateshead jusqu’à celle de Wynniatt. Je confiai au capitaine Allen Young, excellent marin, le soin d’explorer les bords de la terre du prince de Galles ; en outre, il devait inspecter la côte du North-Somerset, depuis le nord du détroit de Bellot jusqu’aux dernières limites atteintes en 1849, par sir James Ross.

« Nos premières recherches de printemps commencèrent le 17 février 1859. Le capitaine Young transporta son dépôt à travers la terre du prince de Galles, pendant que je me dirigeais au midi, vers le pôle magnétique, dans l’espoir de communiquer avec les Esquimaux, et d’en obtenir des informations propres à conduire à bonne fin nos recherches.

« J’étais accompagné par MM. Petersen, notre interprète, et Alexandre Thompson, notre quartier-maître. Nous avions avec nous deux traîneaux tirés par des chiens. Le 28 février, près du cap Victoria, nous eûmes le bonheur de rencontrer quelques indigènes, dont le nombre s’éleva bientôt à quarante-cinq individus.

« Pendant quatre jours, nous demeurâmes en relations avec ces bonnes gens. Nous en obtînmes plusieurs reliques et la certitude que, plusieurs années auparavant, un navire avait été pris par les glaces, au nord de l’île du Roi-Guillaume, mais que tout l’équipage, parvenu à descendre à terre sans danger, s’était dirigé vers la rivière du Grand-Poisson, où il avait péri, jusqu’au dernier homme. Ces Esquimaux étaient bien fournis de bois, tiré, dirent-ils, d’un bateau abandonné par les hommes blancs sur la Grande-Rivière.

Village de neige, habitation d’hiver des Esquimaux. — D’après la relation de John Ross

« Nous retournâmes à notre navire après vingt-cinq jours d’absence, en bonne santé, mais exténués par les longues marches et par les rigueurs du froid auquel nous avions été exposés. Pendant les premiers jours de cette excursion, le mercure était resté constamment gelé.

« Le 2 avril commencèrent nos recherches finales. Le lieutenant Hobson m’accompagna jusqu’au cap Victoria ; nous avions chacun, outre un traîneau tiré par quatre hommes, un traîneau auxiliaire tiré par six chiens. C’était là toute la force que nous pouvions réunir.

« Avant de nous séparer, nous rencontrâmes deux familles d’Esquimaux, vivant sur la glace, dans des cabanes faites de neige. Elles nous informèrent qu’un second navire avait été vu près de l’île du Roi-Guillaume, et que, dans le courant de la même année, il avait été jeté et brisé sur la côte. Ce navire avait été pour eux une mine féconde de bois et de fer.

« D’après le plan arrêté pendant l’hiver pour ces recherches, le lieutenant Hobson était chargé de relier, le long de la terre Victoria, les dernières découvertes de Collinson à celles de Winniatt ; mais, par suite des renseignements obtenus des Esquimaux, je lui donnai l’ordre de faire des recherches sur le naufrage et de suivre toutes les traces qu’il trouverait au nord et à l’ouest de l’île du Roi-Guillaume.

« Accompagné de ma petite troupe, je marchai le long des côtes est de cette même île, visitant les cabanes de neige abandonnées, mais sans rencontrer d’indigènes jusqu’au 8 mai, où, près du cap Norton, nous arrivâmes au village de neige contenant 30 habitants. Ils vinrent à nous sans la moindre apparence de crainte ou d’hésitation, quoique aucun d’eux n’eût vu des hommes blancs en vie auparavant.

« Ils mirent beaucoup d’empressement à nous com-