Page:Le Tour du monde, nouvelle série - 07.djvu/7

Cette page n’a pas encore été corrigée

2 LE TOUR DU MONDE.

nous eûmes encore la bonne chance de rencontrer un aimable compagnon en la personne du Père Eebaïlly, qui allait rendre visite au vicaire apostolique du Yun-Nan, Mgr Escofïfier.

Afin d’éviter des redites, je ne ferai pas la description de cette route déjà connue par les rapports des explorateurs précédents. Je commencerai mon récit à Yun-Nan-Sen, où, grâce à l’obligeance de M. de Labâtie, consul de France à Mongtsé, et de M. Guillemoto, ingénieur en chef des travaux publics en Indo-Chine, je fus attaché à la mission française des chemins de fer de pénétration en Chine, et autorisé à accompagner en cette qualité M. Leclère, adjoint à cette mission.

M. Leclère venait de terminer une partie de son programme, mais était loin d’avoir achevé sa tâche, car dans le but de relier ses statistiques et ses études géologiques comprenant les régions de Lao-Kaï, le haut Yun-Nan et le Sud du Sé-Tchouen, il lui restait encore à parcourir une partie du Yun-Nan et les deux provinces du Kouei-T’eheou et du Kouang-Si, avant de rallier Hanoï. C’était même la partie de son exploration qui paraissait la plus difficile à mener à bonne fin, tant à cause de la longueur de la route, qu’à cause des populations indisciplinées des Miao-Tse et des Tong-Kia du Kouei-Tcheou et des pirates qui infestent le Kouang-Si.

L’expérience que je venais d’acquérir dans la difficile reconnaissance du haut fleuve Bleu, me mettant à même de pouvoir utilement contribuer au succès de l’entreprise de M. Leclère, je n’hésitai pas à lui offrir mon concours.

Nous avions décidé, M. Leclère et moi, de prolonger notre séjour à Yun-Nan-$Sen pour nous donner le temps de prendre les mesures nécessaires au succès de notre futur voyage et permettre au Fou-Taï, gouverneur du Yun-Nan, de prévenir les autorités de la province et de les inviter à nous accorder leur appui. Enfin l’un et l’autre, nous avions grand besoin de nous refaire de nos campagnes d’été et d’automne. La fièvre n’avait pas épargné M. Leclère et l’obligeait à un fréquent emploi de la quinine ; quant à moi, si je n’en étais pas encore atteint, j’étais réellement épuisé. Nous nous installâmes dans une maison chinoïse appelée le Kao-T’i-Han, située juste en face de la grande pagode de la ville et louée par la mission des chemins de fer pour ses membres de passage à Yun-Nan-Sen.

Cette maison, d’une forme essentiellement chinoise, se composait d’une avant-cour entourée de murs dans laquelle on pénétrait par une des faces de côté. Un corps de logis percé à son centre par un porche à deux battants, séparait cette première cour d’une seconde cour intérieure, sur laquelle toutes Les portes s’ouvraient. Au fond de cette dernière s’étalait la maison des maîtres, construite en bois et n’ayant qu’un rez-dechaussée comme tous les autres bâtiments. Il fallait, pour pénétrer dans la maison principale, gravir un large perron en pierre qui donnait sur un couloir à ciel ouvert, soutenu par des colonnes. Les appartements se | composaient d’un vesti-

7 bule au centre, et de


deux chambres à droite

et à gauche, dans les-

quelles le jour pénétrait

par les fenêtres et les

ouvertures de la grande

porte, garnies d’un treil-

lage artistique sur le-

quel du papier chinois

remplaçait les vitres.

Le vestibule était meu-

blé de l’estrade tradition-

nelle de réception, toute

drapée de rouge, de chai-

ses aux pieds contournés

sur les côtés et d’une

table carrée tenant le

milieu de la salle. Au

dehors les toits en ba-

teau, étendantlargement

| leurs angles relevés,

LAG DE YUN-NAN-SEN. (PAGE 8.) —— DESSIN DE BOUDIER. donnaient de l’élégance

à l’ensemble et lui con-

servaient son caractère chinois. Dès notre arrivée à Yun-Nan-Sen, notre premier soin fut d’aller nous présenter à l’évêché. Mgr Escoffier coadjuteur de Mgr Fenouil, voulut bien nous recevoir en compagnie du procureur de la mission, le Père Kircher, du Père Coulmont qui venait des environs de Tong-Tchouan,