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DANTON

SAINT-JUST entre[P 1].
Le peuple se tait brusquement, intimidé. — Saint-Just regarde la foule, froidement, durement, en face. Elle recule. Silence glacial de quelques secondes. Puis des murmures s’élèvent de nouveau, mais moins violents[P 2].
VADIER est rentré à la suite de Saint-Just et profite de l’accalmie d’un instant.

Citoyens, la Commission des subsistances et approvisionnements de la République…

La foule fait taire ceux qui parlent[P 3].
VADIER, continuant.

… porte à la connaissance du public l’arrivage ce soir d’un convoi de farine et de bois au port de Bercy.

Une grande clameur s’élève[P 4]. Débandade générale. La foule se bouscule et se bat pour sortir. Un petit nombre seulement de curieux obstinés restent jusqu’à la fin du procès.
VADIER, regardant la foule, d’un air gouailleur.

Le cœur est bon, mais l’estomac meilleur.

Le jury rentre. La monotonie des questions du président se perd dans les cris de la foule qui sort. Graduellement, le bruit s’éteint au dehors, et la voix d’Herman se fait entendre plus nette. La sentence est prononcée dans un silence de mort.
LE PRÉSIDENT, aux jurés.

Citoyens jurés, — il a existé une conspiration tendant à diffamer et avilir la représentation nationale, à rétablir la


LE PEUPLE.
  1. Saint-Just… Saint-Just… — Un frémissement parcourt la foule. — Un jeune homme qui a commencé le cri de : « Danton en liberté ! » s’interrompt au milieu, et reste, la bouche ouverte.
  2. Une femme, seule. — Danton libre, Saint-Just !

    Plusieurs voix. — La grâce de Danton ! — Murmures.

  3. Hein ! quoi ?… Silence !
  4. Brouhaha général. — Laisse-moi passer ! — Après moi, donc ! — Je suis pressé. — Eh bien, et moi ? — Tu attendras ! — Au diable ! — Vite ! — Attends, je veux voir la fin.

    Deux vieux bourgeois. — Allons doucement, et laissons-les crier. Pas à pas, on va bien loin.