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THÉÂTRE DE LA RÉVOLUTION

Notre poing va battre le despotisme, comme le marteau l’enclume. Hardi, compagnons, forgeons la République !… Force trop longtemps comprimée, qui fais craquer ma poitrine, éclate, déborde ! Roule, torrent de la Révolution !

LA VIEILLE FRUITIÈRE, à cheval sur un canon, un fichu rouge autour de la tête.

Au Roi ! — Voilà mon cheval ! Je l’ai pris. Je vas atteler l’animal à ma petite voiture, et nous allons à Versailles faire visite au gros Louis. J’en ai long à lui dire. Bon Dieu ! depuis des siècles que j’amasse là-dedans misère sur misère, et patience sur le tout,… j’étouffe : il faut que je dégorge. Bonne bête qui me résignais, qui croyais nécessaire de souffrir, pour le plaisir des riches ! Voilà que je comprends maintenant ! Je veux vivre, je veux vivre ! Malheur que je sois si vieille ! Bon sang ! Je veux regagner le temps que j’ai perdu !… Hue ! ma belle, à la Cour !

Elle passe, poussée sur son canon par des hommes du peuple, jambes nues, avec des casques et des armures.
LE PEUPLE.

À la Cour ! À Versailles ! — Oui, nous avons trop souffert ! Nous voulons le bonheur ! Nous le prendrons !

DESMOULINS, une branche verte à la main.

La forêt de la Liberté a surgi des pavés. Les rameaux verts ondoient au vent. Le vieux cœur de Paris refleurit. Voici le printemps !

LE PEUPLE, éclatant de joie et d’orgueil, agitant des rameaux verts, paré de cocardes vertes, de rubans verts, de feuilles vertes.

Libres ! Le ciel est libre !

Le soleil couchant pénètre par l’ouverture du pont-levis, et baigne de ses rayons pourpres la cour de la Bastille, et la foule avec les rameaux.
HOCHE.

Soleil, tu peux dormir, nous n’avons point perdu notre journée.