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de toute dépendance personnelle[1], étaient liés à leurs patrons par des rapports permanents

    communs sont prises, sur la place de l’église paroissiale, par une assemblée composée du maire, des échevins et de quarante des bourgeois les plus éclairés.

    Le seigneur intervient à peine dans ce petit gouvernement local. Ses prérogatives se bornent à nommer un juré qui de concert avec deux autres désignés par les bourgeois, surveille l’emploi des fonds alloués sur les revenus seigneuriaux, pour la défense et l’embellissement de la ville ; à faire grâce dans certains cas spécifiés ; enfin à recevoir le serment des magistrats nouvellement élus. Quant à ses obligations, elles consistent à défendre la commune contre les ennemis du dehors, sans imposer les habitants, ni les requérir pour le service militaire pendant plus de vingt-quatre heures.

    Les bourgeois ont, sur toute la partie du territoire non comprise dans la réserve du seigneur, la jouissance libre et gratuite des produits spontanés du sol, des forêts et des eaux, à la seule condition de se conformer à certaines règles d’ordre public. La pêche du poisson, l’abattage du bois et la cueillette des fruits sauvages fournissent aux familles, surtout aux moins aisées, des subventions précieuses pour la nourriture, ainsi que pour la construction, l’ameublement, l’éclairage et le chauffage des habitations.

    Tel était le degré de liberté et de bien-être dont jouissaient les bourgeois de Beaumont, qu’ils se montrèrent constamment très-attachés à leur organisation municipale. Aux états de Vermandois, réunis en 1556 pour la rédaction des coutumes de la province, ils déclarèrent fermement vouloir s’en tenir aux franchises contenues dans leur charte ; et au xviiie siècle ils résistèrent, avec une énergie digne d’un meilleur succès, aux empiétements par lesquels la royauté inculqua à la France le mépris des coutumes, puis l’esprit de révolution.

    Il ne faudrait pas d’ailleurs objecter que la constitution dont je viens d’esquisser les principaux traits n’aurait eu, au moyen âge, qu’un caractère exceptionnel. Les autres constitutions urbaines étaient, en général, fondées sur les mêmes principes. La loi de Beaumont elle-même fut octroyée par les seigneurs suzerains à un grand nombre de villes du nord-est de la France ;

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