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Que leur pouvoir eſt doux ! l’amoureuſe Déeſſe
Ne cherche, ne reſent que cette tendre yvreſſe
Qui la rend toute à ſon amant :
Quel bonheur de combler les vœux de ce qu’on aime,
Quand en croit ce bonheur même
Se l’attacher plus fortement !
Que j’aime à voir Tithon ! avec combien de zèle
Il ſe livre au plaiſir qui le rendra fidéle,
D’un amour délicat dignes emportemens !
Dans l’eſpoir d’acquérir une foi plus confiante,
Il profite ſi bien de ces heureux momens,
Que de vingt ans il paſſe juſqu’à trente.

Eh ! bien tendres amans, vous voilà raſſurés,
Vos cœurs ſont pour jamais l’un à l’autre livrés,
Vos vœux ſons-ils remplis ? hélas ! peuvent-ils l’être ?
D’un bonheur qu’on n’a point goûté,
On ſe prive aiſément, mais en eſt-on le maître
Lorſqu’on en a ſenti toute la volupté ?
Bientôt les craintes diſparoiſſent,
Les deſirs plus ardens renaiſſent,
Après mille combats, à céder quelquefois
La ſeule pitié l’autoriſe.

C’eſt par excès d’amour qu’à l’ombre de ce bois
La Déeſſe ſe rend, ici c’eſt par ſurpriſe,