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JEANNE


Au petit jour voici la Jeanne
Qui part avec sa mère-grand,
Pour la foire de Saint-Laurent,
A califourchon sur un âne.

Elle entre dans ses dix-huit ans,
Son œil de malice pétille
La jeunesse en elle frétille ;
Comme un carpillon au printemps.

Pas de mines plus éveillées
Quand, après un conte joyeux,
Les garçons lui font les doux yeux,
En teillant le chanvre aux veillées.

Une nonnette en son couvent,
Sous le voile, n’est pas plus fraîche.
Sa joue est une belle pêche
Que le soleil dore en plein vent.

Aussi faut-il voir, c’est merveille,
Tout fier de son fardeau charmant,
Le petit âne aller gaîment,
Tendant le nez, dressant l’oreille.