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Tous ceux que l’Idéal caresse et mord au front ;
Et s’ils veulent bondir au bleu qui les fascine,
Ils sont si rudement tirés par la racine
Que beaucoup en sont morts, et combien en mourront !

Et c’est pourquoi ceux-là, ceux que l’infini hante,
Et qui sont bien vraiment l’humanité souffrante
Si l’on souffre le plus par le plus grand désir,
Sentiront fuir toujours leur cœur et leur pensée
Avec cette nacelle éperdument lancée,
Et, devant sa détresse, un frisson les saisir.




V


Un seul s’est réveillé de ce funèbre somme,
Les deux autres… ô vous, qu’un plus digne vous nomme,
Qu’un plus proche de vous dise qui vous étiez !
Moi, je salue en vous le genre humain qui monte,
Indomptable vaincu des cimes qu’il affronte,
Roi d’un astre, et pourtant jaloux des cieux entiers !

L’espérance a volé sur vos sublimes traces,
Enfants perdus, lancés en éclaireurs des races
Dans l’air supérieur, à nos songes trop cher,
Vous de qui la poitrine obstinément fidèle,
Défiant l’inconnu d’un immense coup d’aile,
Brava jusqu’à la mort l’irrespirable éther !