Page:Le Parnasse contemporain, III.djvu/257

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Prescrivant de traquer partout les hérétiques,
Et Rome bénissait en chantant des cantiques.
C’est la loi. Jésus-Christ, en mourant sur la croix,
Subjugua l’univers entier, peuples et rois ;
Les martyrs, affrontant les tigres et les hyènes,
Firent partout germer les doctrines chrétiennes ;
Car les persécuteurs, en frappant l’innocent,
Ne voient pas l’avenir qui fleurit dans le sang.
Bientôt on arrêta les réformés d’Yssoire.
Jehan Brugière était d’une vertu notoire,
Et partant son forfait d’autant plus odieux.
Horreur ! Il croyait Dieu miséricordieux ;
Il niait le pouvoir des pieuses images,
Et refusait aux Saints un culte et des hommages ;
On l’avait vu lisant des livres prohibés ;
Il ne saluait plus assez bas les abbés,
Et n’avait pas voulu dénoncer ses complices !
Lui, calme, le front haut, et bravant les supplices,
Quand tous ses compagnons, devant les gens du roi,
Tremblaient, d’une voix ferme il confessa sa foi.
Pouvait-on dans le mal s’obstiner de la sorte ?
Donc on l’emprisonna. Puis, sous nombreuse escorte,
Il fut conduit devant le procureur royal,
Comme blasphémateur, félon et déloyal.
Enfin il comparut devant la chambre ardente,
Dont la sinistre horreur manque à l’Enfer du Dante,
Et, comme il affirma sans trouble et sans regret
Sa croyance, la Cour ordonna par arrêt :
Qu’ennemi de l’Église et couvert d’anathèmes,