Page:Le Parnasse contemporain, III.djvu/228

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Qu’ils se taisent ! Nous seuls et l’esprit de nos pères
Restons juges du crime et des devoirs trahis ;
Par fierté, par amour, soyons juges sévères…
C’est le servir bien mal, que flatter son pays.

Mais plus nos doigts sanglants sonderont de blessures,
Plus il apparaîtra de hontes au grand jour,
Plus la sainte Patrie aura subi d’injures,
Plus le deuil sera grand… plus grand sera l’amour !

Je t’aimais glorieuse, et t’adore insultée ;
Je me sens mieux ton fils en pleurant tes revers,
France ! ô mère ! ô grandeur que j’ai trop peu chantée,
A toi mon dernier souffle, à toi mon dernier vers !

Enfants ! si votre père, en butte à quelque outrage,
Vieux, proscrit, mutilé, portait son propre deuil,
C’est alors que debout, pleins d’amour, pleins de rage,
Vous vous diriez ses fils avec le plus d’orgueil.

Soyons ainsi, nous tous, les fils de la Patrie,
Humbles devant son Dieu, fiers devant l’étranger,
Tenons-nous le cœur haut et la main aguerrie ;
Faisons-nous des vertus dignes de la venger.

Jeunes gens qui serez meilleurs que nous ne sommes,
Vous qui vaincrez — mon cœur a son pressentiment ! —
Sous les drapeaux, le jour où vous devenez hommes,
Avancez, la main haute, et prêtez ce serment :