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Comme un mort déposé dans son caveau tout seul,
Il étouffait ton cœur sous le même linceul !
Le formidable enfant, vois-tu, le dieu suprême
Ne blesse de ses traits que les mortels qu’il aime.
Tous briguent sa colère &, sous ses étendards,
Brûlent de s’exposer à ses terribles dards ;
Car chez les immortels, ainsi que sur la terre.
Sa colère est la paix, & son oubli, la guerre !

Mais, écoute : j’entends des ailes dans les bois,
L’Amour a prononcé ta grâce de sa voix ;
Le dieu s’est apaisé ; pour fermer ta blessure,
Le charbon flamboyant va toucher la souillure ;
Enfant, réveille-toi, peut-être que demain
L’Amour purifiera ce qu’a souillé l’hymen.
C’est l’Amour, c’est l’Amour ! ouvre donc ta paupière
Et de ton froid tombeau rejette enfin la pierre.
Laisse ta fausse mère en proie à ses remords,
Enfant, laisse dormir les morts avec les morts !
Laisse ton corset d’or, laisse tes pierreries,
N’emporte que ton cœur & va par les prairies.
Quand, le cœur près du cœur, quand, la main dans la main,
Vous passerez tous deux par le même chemin,
Lorsque tu reverras la région connue
Où jadis tu languis, glacée & demi-nue,
Le ciel resplendira de nouvelles couleurs,
Le sol s’émaillera de merveilleuses fleurs,
Et toi, pour les cueillir te courbant vers la terre,
Dans ce lieu si peuplé, jadis si solitaire,