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Par les figuiers géants & les hauts acajous,
Sautant de branche en branche ou pendus par leurs queues,
Innombrables, de l’aube au soir, durant des lieues,
Avec des gestes fous hurlant & gambadant,
Tout le long de la mer les suivaient.
Tout le long de la mer les suivaient. Cependant,
Poussé par une tiède & balsamique haleine,
Le navire, doublant le cap de Sainte-Hélène,
Glissa paisiblement dans le golfe d’azur
Où, sous l’éclat d’un jour éternellement pur,
La mer de Guayaquil, sans colère & sans lutte,
Arrondissant au loin son immense volute,
Frange les sables d’or d’une écume d’argent.

Et l’horizon s’ouvrit magnifique & changeant.

Les montagnes, dressant les neiges de leur crête,
Coupaient le ciel foncé d’une brillante arête
D’où s’élançaient tout droits au haut de l’éther bleu
Le Prince du tonnerre & le Seigneur du feu :
Le mont Chimborazo dont la sommité ronde,
Dôme prodigieux sous qui la foudre gronde,
Dépasse, gigantesque & formidable aussi,
Le cône incandescent du vieux Cotopaxi.

Attentif aux gabiers en vigie à la hune,
Dans le pressentiment de sa haute fortune,
Pizarre, sur le pont avec les Conquérants,
Jetait sur ces splendeurs des yeux indifférents,