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CHARLES CROS

——


LENTO


Je veux ensevelir au linceul de la rime
Ce souvenir, malaise immense qui m’opprime.

Quand j’aurai fait ces vers, quand tous les auront lus,
Mon mal vulgarisé ne me poursuivra plus.

Car ce mal est trop grand pour que seul je le garde ;
Aussi j’ouvre mon âme à la foule criarde.

Assiégez le réduit de mes rêves défunts,
Et dispersez ce qu’il y reste de parfums,

Piétinez le doux nid de soie et de fourrures ;
Fondez l’or, arrachez les pierres des parures ;

Faussez les instruments ; encrassez les lambris,
Et vendez à l’encan ce que vous aurez pris.