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VIII


Un rêve de bonheur qui souvent m’accompagne,
C’est d’avoir un logis donnant sur la campagne,
Près des toits, tout au bout du faubourg prolongé,
Où je vivrais ainsi qu’un ouvrier rangé.
C’est là, me semble-t-il, qu’on ferait un bon livre :
En hiver, l’horizon des coteaux blancs de givre,
En été, le grand ciel & l’air qui sent les bois,
Et les rares amis, qui viendraient quelquefois
Pour me voir, de très-loin pourraient me reconnaître
Jouant du flageolet assis à ma fenêtre.


IX


Quand sont finis le feu d’artifice & la fête,
Morne comme une armée après une défaite,
La foule se disperse. Avez-vous remarqué
Comme est silencieux ce peuple fatigué ?
Ils s’en vont tous, portant de lourds enfants qui geignent,
Tandis qu’en infectant les lampions s’éteignent.
On n’entend que le rhythme inquiétant des pas,
Le ciel est rouge. Et c’est sinistre, n’est-ce pas ?
Ce fourmillement noir dans ces étroites rues,
Qu’assombrit le regret des splendeurs disparues.