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« Le silence entendit ma voix qui soupirait,
Disant : « La perle dort dans le secret des ondes ;
« Or, je veux me baigner dans des amours profondes
« Comme tes belles eaux, lac de Génésareth !

« Que votre chaste haleine à mon souffle se mêle,
« Tranquilles nénufars, afin que le baiser
« Que sur le front élu ma lèvre ira poser,
« Calme comme la mort, soit infini comme elle ! »

« Telle je soupirais au bord du lac natal,
Mais sur mes flancs blessés une mauvaise flamme,
Rebelle, dévorait ma chair avec mon âme,
Et voici que je meurs sur mon lit de santal.

« Pourtant, j’accepte encor la part de Magdeleine :
J’avais choisi l’amour & j’avais eu raison.
Comme Marthe ma sœur qui garda la maison,
Je n’aurai point pesé la farine ou la laine.

« La jarre au ventre lourd d’olives ou de vin
Dans les soins du cellier n’aura point clos ma vie ;
Mais ma part, je le sais, ne peut m’être ravie,
Et je l’emporterai dans l’inconnu divin ! »

Elle dit : le reflet des choses éternelles
L’illumina d’horreur & d’épouvantement.
Alors elle se tut & pleura longuement :
Une âme flottait vague au fond de ses prunelles.