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LE PAUVRE SAVANT




Il n’avait qu’un habit vert,
Un mince habit tout en loques,
Et ses dents claquaient l’hiver,
Comme un pendant de breloques.

Loin des boulevards sablés
Il traînait par la ruelle
Ses vieux souliers éculés
Et sa pensée immortelle.

On l’a vu passer souvent
Souriant d’un air étrange,
Inspiré, cheveux au vent,
Bohémien à face d’ange.

On l’a vu souvent aussi,
Avec des morceaux de briques,
Tracer sur des murs noircis
Des formules algébriques.

Longtemps, longtemps il restait
Pensif devant ces murailles.
Il gelait ; la faim battait
La charge dans ses entrailles…