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LES DÉLIVRÉS


Tous ceux qui s’appelaient en se tendant les bras,
Grands éplorés toujours loin de leurs Eurydices,
Martyres des exils plus longs que les supplices,
Cher ange de la Mort, tu les rapprocheras.

Tu sculptes dans l’éther de bien beaux Alhambras,
Pour y perpétuer nos furtives délices,
Et dans ton saint mépris pour les hymens factices,
Où l’homme a désuni, toi tu réuniras.

Alors tu nous verras, fous de béatitude,
Nous deux que l’existence avait tant séparés,
Nous enivrer d’azur moins que de solitude,

Savourer la douceur d’être enfin délivrés
Et ne sentir jamais notre lèvre assouvie,
Nous étant si peu vus pendant toute la vie !




PLACIDA


Lorsque nous revenons de Perpignan la nuit,
Vers toi mon cœur plus libre et plus léger s’élance
Vers tes yeux alanguis de noble nonchalance,
Pôle mystérieux dont l’aimant me conduit.

Une douceur lactée emplit les cieux : le bruit
Glisse mélodieux à travers le silence.
L’apaisement s’étend ainsi qu’une aile immense ;
La clarté pacifique aux fronts des astres luit.