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Font luire et palpiter l’or douteux de leurs ailes.
— Les horreurs de ce lieu lui devenaient mortelles.
Il chancela bientôt, et ses puissants poumons,
Faits à l’air pur et sain des forêts et des monts,
Se gonflaient, réclamant cet air avec des râles,
Et ses tempes battaient, ses lèvres étaient pâles.
— « Je veux sortir d’ici ! » Mais il se sentit choir
Et connut ce que c’est que de ne pas pouvoir
Quand on a dit : Je veux. — « Il faut bien que je sorte,
Je ne veux pas mourir… » Et jusques à la porte,
Par un effort suprême, il parvint à tâtons :
— « Air sacré, jour sacré, lorsque nous vous goûtons,
» Nous ignorons, dit-il, quels bienfaiteurs vous êtes,
» Gaîté des vagabonds et force des athlètes ! »
Il se leva. Non loin, comme il allait errant,
Il vit l’Alphée, un fleuve au rapide courant.
« Tu m’es, fleuve propice, envoyé par mon père !
» Ces étables m’ont fait reculer, mais j’espère
» Avec tes flots les vaincre en te prêtant mon bras ;
» Viens, je vais t’y conduire et tu les balaîras. »

Il n’emprunta d’outils qu’à la forêt prochaine.
Avec un pieu taillé dans le plus dur d’un chêne
Dont le tronc dégrossi lui servait de maillet,
Comme un grand ciseleur le héros travaillait.
Sous la braise du ciel et les pieds dans la terre,
Il travaillait sans plainte, ouvrier solitaire,
Jusqu’à l’heure où trahi, du jour mais non lassé,
Il dormait sous la lune au revers du fossé.
Enfin dans la profonde et large déchirure
L’onde précipitée accourt, bondit, murmure,
Sur l’étable se rue et, grossissant toujours,
En fait sonner les toits de ses battements sourds ;