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enthousiasme

Pauvre Jane ! Pourtant, elle n’était à plaindre que parce qu’elle était dépourvue ; elle avait trouvé la maison idéale. Nulle part, ses bévues n’auraient été pardonnées avec cette indulgence. Nulle part, elle n’aurait eu pour maîtresse une jeune femme aussi désintéressée, aussi attentive, aussi désireuse de l’aider, de la secourir au besoin, de l’améliorer.

Celle-ci constata trop vite que son enseignement ménager tombait dans un sol inculte et pierreux ; elle tenta de compenser cet insuccès en endoctrinant Jane peu à peu, en lui communiquant un grand désir d’aimer Dieu et de travailler à acquérir pour le ciel autant de mérites que possible. Puisque tout, en Jane, laissait prévoir une vie qui resterait misérable, qu’au moins la pauvre enfant sût comment s’amassent ces trésors que ni la rouille, ni les vers ne rongent.

Jane devint touchante de piété, et admirable de foi.

Les huit années qui la conduisaient à sa majorité passèrent ainsi. Le seul changement, ce fut lorsque Jane, probablement, raconta dans ses fidèles et nombreuses lettres, qu’elle toucherait à ses vingt et un ans, toute une petite fortune. À cette nouvelle la tendresse de sa lointaine mère parut se ranimer, une flamme d’intérêt jaillit, inattendue, des cendres qui semblaient à jamais refroidies. Jane commença de recevoir des invitations pressantes. Il fallait qu’elle vienne revoir sa mère maintenant qu’elle était jeune fille…

— Je pourrais, hein, madame, en troisième classe ?