Page:Le Normand - Enthousiasme, 1947.djvu/58

Cette page a été validée par deux contributeurs.
56
enthousiasme

La maman calma donc sa fille aînée et elle décida de laisser faire encore quelque temps.

L’idylle continua. L’amoureux fidèlement arrivait tôt et demeurait le plus longtemps possible. Il entourait Isabelle d’attentions, de prévenances. Tout ce qu’elle faisait semblait beau, tout ce qu’elle disait était drôle. Souvent aussi, muet d’admiration, il la contemplait sans rien dire.

Isabelle souriait. Quand il n’était pas là, elle allait dans la maison plus légère que jamais, elle marchait comme volent les papillons. Et elle souriait d’un mystérieux sourire ; la vie d’Isabelle avait son secret…

Sa mère la surprenait parfois qui se berçait rêveuse près de la fenêtre donnant sur la route par laquelle il reviendrait, et son mystérieux sourire était là continuel, et c’était en même temps un sourire si heureux qu’il en était émouvant. Les coins de la fine bouche remontaient, les grands yeux bruns brillaient, tendres comme la lampe qui veille…

— À quoi penses-tu, Isabelle ?

— À Jean, maman. Il m’aime tellement, si tu savais ! Il m’aime et il me trouve assez belle !

— Il te l’a dit ?

— Oui, bien sûr. Il m’a dit qu’il me trouvait belle, belle, plus belle que Deanna Durbin, maman, pense donc ! Mais ça, j’sais bien que ce n’est pas vrai…

Le moment était venu de glisser un mot…

— Non, ce n’est pas vrai, bien sûr ! Et puis, ce n’est pas de l’amour, tu comprends, à votre âge. À votre âge, on ne parle pas d’amour. Jean est