Page:Le Normand - Enthousiasme, 1947.djvu/164

Cette page a été validée par deux contributeurs.
162
enthousiasme

Elles dînèrent, parlèrent d’autre chose, et Linette qui était en vérité un peu linotte, oubliait déjà l’incident.

— Mais tu n’as pas ton colis ? Où est ta laine ?

— Si tu penses que j’étais pour traîner ça, je l’ai fait envoyer.

— Comment pourrais-je alors, te monter ton gilet cet après-midi ?

— Ah ! c’est vrai. Eh bien, nous ferons autre chose. J’en avais acheté tellement ! La vendeuse me connaissait. Elle ne devait pas m’en vendre autant. Mais elle a consenti à inscrire cela sur deux factures, comme si j’étais deux personnes, ce que je suis en réalité, à peu près… Mais que je suis fatiguée ! Tu n’as pas vu la bataille, toi ! Tu n’as pas idée de ce que c’était. Quand j’y pense…

Elles reprirent le 65. En approchant du séminaire de philosophie, Linette fit admirer à Jeanne le magnifique point de vue :

— C’est ici que je n’ai pas pu m’empêcher de parler à ma voisine. Regarde-moi ce ciel, ces arbres, ce soleil ! Ah ! je sais, j’ai trop d’enthousiasme.

Le trajet fut vite fait. Elles montèrent à l’appartement, jetèrent leurs manteaux et leurs chapeaux sur le lit.

Puis, Linette s’approcha de la coiffeuse pour se regarder, prit la brosse à cheveux et poussa un cri affreux…

Un vrai cri de terreur.

Jeanne fut tout de suite auprès d’elle.