Page:Le Normand - Enthousiasme, 1947.djvu/112

Cette page a été validée par deux contributeurs.
110
enthousiasme

André ayant appris ces imprudentes paroles, résolut de corriger Ghislaine et de lui prouver qu’il était toujours absolument pareil à Guy. Il alla la chercher pour le mois de Marie comme le faisait son frère ordinairement. Il l’amena au restaurant ensuite, manger une crème glacée. Il fit toute la petite soirée comme s’il était Guy, et quand il la quitta, lui dit :

— Tu es bien sûre, toi, Ghislaine, que tu me reconnais toujours ? C’est drôle que les autres se mêlent…

Tendrement, elle affirma qu’elle le reconnaissait toujours.

Le lendemain, tout le quartier savait l’histoire, et elle en voulut à André et s’attacha davantage à Guy.

Ce qui n’empêcha pas les jumeaux de continuer à être bien « mêlants ».

Le temps de torturer l’instituteur était passé, ils travaillaient maintenant, mais au même endroit, au même métier. Ils se levaient à la même heure, partaient ensemble, revenaient ensemble. Ce n’était plus des enfants, et ils se faisaient la barbe. Parfois, un matin, Guy sortait de la salle de bain, une éraflure au menton. Au déjeuner tout à coup, leur mère s’exclamait.

— Regardez-moi André qui s’est éraflé à la même place, lui aussi !

Pour tout, il en était ainsi.

Pareil phénomène s’était-il jamais vu ?

Mais la vie avançait et ils eurent dix-neuf ans et notre monde était en guerre, hélas ! Leur mère