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à la Sorbonne. M. Brunot, en des termes qui le rendraient digne assurément de l’Académie du Gourguillon, n’a point manqué de faire l’observation suivante : Nec mirum, cum illud vocabulum bugne, a quo Bugnon, aut Bugnyon facile duci potest, in vulgari provinciae lugdunensis lingua usitatissimum sit, atque adhuc ii quorum mens parum acuta habetur, bugnes vel bugnasses haud raro dicantur.

BUNE, s. f. — Borne, pierre servant de limite aux héritages. Me promenant un jour avec mon cousin Cauliard de Mornant, nous voyons une brave femme de la montagne s’amener sur son mulet, jambe de ci, jambe de là. Cauliard aimait à gandoiser : Eh, bona fèna, vos z’êtes bin in fin jaumètre : vos partagi lo mondo ! — Voua ! mé y è pôs vos que plantaré la buna ! repartit gaillardement la bonne femme. — Du bas latin bodina, même sens, lui-même d’un radical qui exprime l’idée de renflement.

BUSQUE, s. m. — Buste. As-te vu à Saint-Pierre le busque en bronze de M. Filochard, comme il est ressemblant ? — S’est-i fait tirer de face ou de prophyre ?

BUT, s. m. — Le Cochonnet, au jeu de boules. On le nomme aussi le petit. Tirer le but, Lancer contre lui une boule, de manière à l’envoyer au loin.

BUTIN, s. m. — Mobilier, hardes. Avoir beaucoup de butin. Date de l’invasion de 1814-1815, l’idée de butin, c’est-à-dire de choses acquises par le pillage, s’étant complètement confondue chez nos frères d’outre-Rhin avec celle de biens mobiliers quelconques. Le mot de butin a d’ailleurs une origine germanique, la pensée de pillage étant caractéristique de l’état d’âme des hordes envahissantes à la fin de l’empire romain.

Le supérieur d’une institution religieuse de Lyon avait loué, dans une maison de rapport, un local à un cordonnier allemand. Il alla voir l’installation de son locataire, et lui fit compliment de son mobilier. Schuster de répondre en se rengorgeant : C’être rien, ça, Monsi lé quiré : temain ch’arriferai afec ine bleine foidure de pûtin ! Le pauvre prêtre s’enfuit épouvanté.

BUVABLE, adj. — Qui peut se boire. Ce mot, si naturellement dérivé, est proscrit par les puristes, mais Littré lui a donné place dans son dictionnaire.

BUVANVIN, s. m. — Ivrogne. Jean Brunier (prononcez Bruni), notre granger, élaitun brave homme, mais quelque peu buvanvin. Un dimanche, à trois heures, mon père le trouve le pouce sur le loquet du Bon Coin, à Saint-Irénée. — Eh, Jean, que faites-vous là ? — Monsu, j’allôve à vêpres. — Au moins, disait mon père, s’il n’avait pas eu le pouce sur le loquet!

BUVENDE, s. f. — Piquette faite avec de l’eau jetée sur le gêne. Le P. Monet, dans son Parallèle (1642), écrit à Lyon, donne « buvande, beuvande, vin de dépanse ». Cotgrave (1675), qui renferme beaucoup de mots lyonnais, le donne sous la définition de « petit vin, vin de ménage, vin des domestiques ». — De bibenda.

BUVANDIÈRE, s. f. — Femme qui coule la buye. Molard (1810) dit que la buyandière est une femme qui lave la lessive. Erreur. Celle qui lave le linge au lavoir ou à la plate se nomme lavandière. Une comédie patoise du xviie siècle nous apprend qu’à cette époque, une buyandière était payée huit sous par jour, mais on le nourrissait et on lui fournissait le savon.

Frais comme les cuisses d’une buyandière. Je donne le proverbe pour ce qu’il vaut, n’en ayant jamais vérifié l’exactitude. Avoir les mains fraiches comme les cuisses d’une buyandière est signe de santé.

BUYANDIÈRES, s. f. pl — Tranches de bœuf bouilli, sautées avec des oignons. Cela s’appelle aussi du bouilli à la poêle. — De ce que c’était un mets fréquemment donné aux buyandières, comme le lard aux billiouds.

BUYE (bu-ye), s. f. — Lessive, mais au sens restreint de lessive coulée. Couler la buye, mais non laver la buye. (Cependant Despériers dit lavait sa buée.) — Amour de gendresse, amour de gendre, buye sans cendre. — Vraisemblablement subst. verbal de bucare, filtrer.

S’entend de lessive, pris en tous sens. Faire un commerce de buye, entreprendre le blanchissage. Un tel a une bonne buye, a une bonne maison de blanchissage.