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l’endroit par où les pains se touchent n’est ni cuit ni bon. L’Académie admet au reste baisure du pain.

Baiser le… fond de la vieille. — Se dit quand, dans une partie de boules, on ne fait point de points. Pardon de l’expression que je ne puis changer. — Et puis quoi ! les imprimeurs n’ont-ils pas toujours à la bouche des fonds-de-lampe, et les cuisinières des fonds d’artichauts ? Ne dit-on pas couleur fond de bouteille, noir comme le fond de la poêle ? Certain oiseau de terre ne s’appelle-t-il pas fond-blanc, et certain oiseau de mer paille-en-fond ? Quand on fait la moue ne fait-on pas la bouche en fond-de-poule ? Ne savez-vous pas que le brave Vendôme se désolait de mourir la paille au fond ? Les dames ne portent-elles pas des faux-fonds, encore qu’il y ait quelque chose de vrai au fond ? Scarron n’était-il pas fond-de-jatte ? Molière ne dit-il pas : « Un fond de couvent me vengera de tout cela » ? Mme de Genlis n’écrivait-elle pas : « Si l’on porte encore des fonds, je vous prie de m’en envoyer deux » ? N’avons-nous pas tous lu, dans la Revue des Deux mondes, des articles de M. Foncheval-Clarigny ? Et la bonne religieuse ne disait-elle pas : « Je raccommode la fonlotte de M. le fonré » ?

Baiser à la religieuse. — Tous ceux qui ont pratiqué les jeux innocents (hum !) savent que c’est un baiser donné à travers les barreaux du dossier d’une chaise, figurant la grille du couvent. Je suppose l’expression répandue ailleurs qu’à Lyon.

BAISSER. — Il n’y a qu’à se baisser pour en prendre, pour dire qu’une chose est très commune. Des maris qui ne le sont pas, disait avec un juste orgueil la bourgeoise de mon maître d’apprentissage, c’est pas de ça qu’on peut dire qu’il n’y a qu’à se baisser pour en prendre !

BAISSIÈRE, s. f. — Bouteille que l’on a remplie avec le vin du fond de la bareille, et que l’on met communément dans le caquillon où se fait le vinaigre. Quand le caquillon est plein et qu’on a des baissières de trop, on peut les filtrer à la chausse. Cela fait encore du vin pour faire boire aux vogueurs lorsqu’ils apportent la brioche. — De baisser. Le mot est au Dict. de l’Acad., qui donne une définition peu exacte, en attribuant à la lie le nom des bouteilles pleines de cette lie. Notre sens est celui de Rabelais : « Quelques méchantes baissières pour le vinaigre. »

BAJAFLE, s. des 2 g. — Qui est accoutumé de bajafler. — Subs. verbal de bajafler.

BAJAFLER, v. n. — Parler ou agir inconsidérément. Un jour Ricot, impatienté des observations de son ami Godinard, lui répondit brusquement : Te bajafles ! De quoi l’autre se blessa. Mais, fit Ricot, je ne t’ai pas dit (brusquement) : te bajafles ! mais (avec des modulations et finissant amoroso), te ba… ja… fles !Alors ! fit Godinard, c’est différent ! — Onomatopée d’une parole mâchonnante, avec le préfixe péjoratit ba. Comp. milanais bajaffa, même sens.

BALADE, s. f. — Promenade, avec l’idée de flânerie. J’ai vu un jour à la Guillotière cet écriteau : À vendre, voiture de balade. On comprenait tout de suite qu’il ne s’agissait ni d’un tombereau, ni d’un fiacre de Venissieux.

BALADER (SE), v. pr. — Se promener en flânant. En littérature il faut peser les mots. Se balader n’est pas la même chose que se bambaner. Quand on se balade, on est guilleret ; quand on se bambane, on va plan plan ; quand on est vieux comme moi, on se lentibardane. — De baller, parce qu’on va en se balançant comme à la danse.

BALADOIRE, adj. — Fête baladoire, Vogue. — De baller, parce qu’on y danse.

BALAN, s. m. — 1. Action de se balancer. Une cloche qui prend le balan.

2. Être en balan. — Être perplexe. Un de mes bons amis, allant pour se marier, hésitait entre deux partis : Je suis en balan comme un chat entre deux melettes, qu’il me disait tout pensif. — Vieux prov. balans, perplexité. Pour le sens 1, de baller ; pour le sens 2, de balancer.

BALANCES. — Nous employons toujours ce mot au pluriel : J’ai acheté des balances… Les Balances de la Justice. C’est l’idée des deux plateaux qui s’est étendue à l’objet.

BALAYER. Voy. à Parterre.

BALAYETTE, s. f. — 1. Petit balai de crin qui sert communément à balayer la foyère.

2. Petit balai de jonc, qui, parlant par respect, sert à approprier les thomas.