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ce m’ssieu ?… Autrement, que dites-vous de la politique ? On emploie aussi effectivement au même usage, en abrégeant en Fectivement.

AUTRES FOIS (LES). — Les autres fois pour autrefois me semble fort rationnel, car autrefois ne voudrait rien dire s’il n’était une apocope de « les autres fois ».

AUVENT, s. m. — Assemblage de trois planches peintes en clair au-devant d’une fenêtre. Celle d’en face, rectangulaire, est inclinée pour diriger le jour d’en haut à l’intérieur. Les deux autres, en forme de triangles isocèles, maintiennent la première et empêchent les rayons latéraux de pénétrer horizontalement. Il paraît que quelque chose de semblable était déjà connu au XVIIe siècle : « il a le cati et les faux-jours pour faire valoir sa marchandise, » dit la Bruyère des marchands de son temps. On met aussi des auvents aux fenêtres des couvents, des prisons, pour empêcher de voir dans la rue.

Le mot, au sens lyonnais, est moderne. En vieux lyonnais, auvent a le sens français. 1536, 25 avril, « A été ordonné à Humbert Paris, voyer de la ville… de faire abattre tous les auvans de posts (charpente) et autres forgets qui sont tant sur les rivières que parmi les rues de la Ville. »

Paraît représenter ante ventum. L’emploi de avant-vent pour auvent en vieux français donne de la créance à cette étymologie.

AVALE, s. f. — Une avale d’eau. Une trombe, une grande averse. Avale est ici par confusion avec aval, au sens de chute. Et, en effet, dans une trombe la terre avale beaucoup d’eau. « Dites avalaison ou avalasse. » (Molard.) — À quoi A. Fraisse de répondre : « Non, Molard, ne croyez pas ! Jamais je ne pourrai me résoudre à dire l’avalasse du Niagara ni l’avalaison du Rhin ! »

AVALE-TOUT-CRU. — Glouton. Au fig. matamore, avaleur de charrettes ferrées.

AVALÉ, ÉE, adj. — Avoir les joues avalées, ou creuses. C’est le contraire du sens primitif. Avalé, d’aval ad vallem, veut dire pendant, flape. Dans les campagnes le sens s’est conservé : Cela fena a le tette avaló, cette dame a des appas avalés. Mais le sens étymologique s’étant perdu chez nous, le lyonnais a vu dans joues avalées l’idée de quelqu’un qui aurait avalé ses joues, ce qui, en effet, l’amaigrirait beaucoup.

AVALER. — Avaler le gorgeon, Essuyer une perte, éprouver un déboire, arrivé le plus souvent par sa faute. Vous avez eu l’imprudence d’entrer en visites avec la fille de votre portière, qui vous a rendu père. Force est de l’épouser. Il faut avaler le gorgeon, et quel gorgeon ! Et que de gorgeons jusqu’au dernier : « Frère, l’heure a sonné, il faut avaler le gorgeon ! »

AVALOIR, s. m. — Gosier. J’ai eu la barbe blanche longtemps avant les cheveux. Un bon canut, sans gêne, que j’avais pour ami, prétendait que ça tenait à ce que, chez moi, l’avaloir avait plus travaillé que l’entendoir.

Les Lyonnais font souvent masculin les mots en oire : un écritoir, un araignoir, un avaloir. « Dites avaloire. » (Molard.) Arm. Fraisse, qui avait subi l’influence lyonnaise, ajoute : « Encore un conseil que je ne puis me décider à suivre. » En quoi il a tort. Il disait certainement une passoire. Or qu’est-ce qu’un avaloir, si ce n’est une passoire sans grille ?

AVANCES. — Avoir des avances, être dans ses avances, Avoir quelque chose devant soi. Et en effet, celui qui a quelque chose a de l’avance sur celui qui n’a rien.

AVANGLÉ, ÉE, s. — Personne très gloutonne : Te bâfres comme un avanglé. Au fig. très avide. — Les mots d’oc afangala, avangouli paraissent donner la clef : famem plus l’armoric. gwal, mauvais. Comp. faimgale, devenu fringale. Avanglé, qui a la fringale.

AVANT, s. m. — Les anciennes églises du Lyonnais avaient souvent la grande porte abritée par un toit reposant sur des colonnes ou simplement supporté par des consoles. C’est l’avant.

AVANTAGE. — Un habit à l’avantage, Un habit à dessein un peu trop grand. On avait eu le tort de négliger de faire mon habit de première communion à l’avantage, de sorte qu’il n’a pu servir pour mon mariage.

À l’avantage. — Manière d’adieu. On sous-entend de vous revoir.

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