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à la ville, où ils devenaient compagnons, puis maitres et chefs d’atelier. J’ai été quelque temps dans un atelier où tous les gens, du bourgeois à l’apprenti, étaient de Chaussant et de Saint-Vincent. C’est ainsi que quelques expressions villageoises se sont introduites dans notre parler.

Grosses gens, bonnes gens. Parce que l’envie, la méchanceté font maigrir.

GROTON, s. m. — Forme de grouton et plus usitée.

GROTTE, s. f. — C’est un chanteau du dernier pain bénit, que le sacristain porte chez un paroissien pour lui annoncer que c’est son tour d’offrir le pain bénit le dimanche suivant. — De crusta.

GROUGNER, ÉGROUGNER, v. a. — Entamer avec les dents. Jean-Marte, n’égrougne don pas ton pain comme ça, on dirait que t’as gin d’éducance ! — Vieux franc. esgruignier, ébrécher.

GROUGNON, GROGNON, s. m. — Endroit où les pains se sont baisés dans le four. Êtes-vous comme votre serviteur ? Je n’ai jamais pu manger le grognon. — De grougner.

GROUILLER. v. n. — J’ai trop mangé de fiageôles, le boyes me grouillent. — Le feu d’articifle ne tardera pas !

GROUPER, v. a. — Prendre, saisir. Je prends d’âge ; j’y vois trouble. Heureusement je sais pas lire, ça me gêne pas. Quoique ça, faut grouper les lunettes pour remonder.

Des fils qui se groupent, terme de canuserie, Des fils qui s’accrochent par suite de râches.

GROUTON. — Un grouton de pain. Un croûton de pain. — Comp. grotte, de crusta.

GRUNE, s. f. — Voy. sous casser.

GUENILLARD, s. m., terme très péjoratif. — Il est venu un guenillard ; il avait si tellement mauvaise câle, que si le grosse l’avait vu, y avait de quoi la faire blesser.

GUENILLE. — Ses quatre quenilles, L’ensemble de ses hardes. La femme, à son mari : Si te continues à m’enquiquiner comme ça, j’aurai tôt fait de ramasser mes quatre quenilles. et de m’en aller chez ma m’man !

GUENILLON. — Une Marie Guenillon, Une femme sans ordre, qui va en guenilles. Voy. Graillon.

GUENIVELER, v. n. — Vaciller, bouger. Y a un ponteau que s’est lâché ; ça fait gueniveler le méquier. — De niveler, avec un préfixe péjoratif ga, qu’on retrouve dans le patois lyonnais. La forme primitive a dû être ganiveler = déniveler, avec légère déviation du sens.

GUÊPIER, s. m. — Anthrax dont le pus s’écoule par plusieurs trous, ce qui a quelque rapport avec les alvéoles d’un nid de guêpes.

GUÉRI. — Un homme guéri de bien faire, Un pas-rien.

GUÉRIR. — Se guérir, aux bèches, c’est se faire jicler de l’eau sur les membres, sur le corps, avant de se jeter à l’eau, afin de ne pas être trop saisi par l’impression du froid. Les vrais nageurs ne prennent pas la peine de se guérir. — Pouf ! une tête ou un hausse-pieds ! — Se guérir est pour s’aguerrir.

GUÉRITE, nom propre. — Marguerite. On disait plutôt Garite pour Marguerite. Le nom de Garite figure en effet sur des actes de naissance dont les titulaires ont été baptisées Margarita.

GUERLE, adj. des 2 g. — Louche. C’est franc dommage que la Parnon soye guerle : ça serait une belle bôye ! — Laisse don, c’est ben mai agriâble. L’autre jour, à table, chez Mille, le faisait à gauche un œil doux au Pacôme, el à droite un œil doux au Boniface ! — Ouin ! et t’oublies que j’étais en face, qu’elle m’écrasait le clapoton ! — Vieux français guerle, même sens.

GUERRE. — Le sanque me fait la guerre, L’excès de sang me cause des incommodités. La monnaie nous fait la guerre, Nous avons de la peine à nous procurer de la monnaie, et autres phrases de même nature.

GUEULE-DE-LOUP, s. m.— Mûflier, antirrhinum majus. — De ce qu’en pressant les deux côtés de la fleur, on la fait ouvrir et fermer comme une gueule. D’autres disent Gueule-de-viau, ce qui est peut-être plus distingué.