Page:Le Littré de la Grand'Côte, éd. 1903.pdf/169

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Faire dans les draps, les nouveautés, etc. Faire le commerce de ces articles. Lorsque Napoléon revint de l’île d’Elbe, il reçut à Lyon les notabilités de la ville hommes et dames. Tâchant d’avoir un mot aimable pour tous, il dit à une dame : Que fait votre mari ? — Sire, il fait dans les draps (historique).

Rendez-moi donc le livre que je vous ai prêté, il me fait besoin pour « J’en ai besoin ». Faire besoin est dans Molière.

Faire faute. La même chose que faire besoin.

Faire courage, Se donner du cœur à l’ouvrage, redoubler d’efforts. Allons, il faut avoir une postérité ! Fais courage ! disait un bon-papa à son petit-fils, marié depuis trois ans et qui n’avait pas d’enfant.

Faire contre. Voy. contre.

Faire son grand tour, son petit tour. Demandez aux fillettes des écoles. En levant la main : Ma sœur, mon grand tour !

J’ai besoin de prendre l’air, je vais faire un tour. Sous-entendez « de promenade ».

J’ai fait demander de vos nouvelles, d’après Humbert, n’est pas français. Il faut dire : J’ai envoyé savoir. Si je comprends en quoi « faire demander des nouvelles » est incorrect, je veux être empalé !

J’ai beaucoup à faire. Même observation. Dites : J’ai beaucoup d’affaires, ajoute Humbert. — Pas du tout, ce n’est pas la même chose, pas du tout.

Je m’en suis fait (ou mis ou f…chu) pour quinze sous, Cette fantaisie ou cet accident m’a fait dépenser quinze sous.

Faire son fendant, son faraud, dites : « faire le fendant, etc. » (Humbert.) — Je crois qu’il a tort. On dit en effet « sentir son épaule de mouton », quoique l’épaule ne soit pas à celui qui sent. Je pense que la meilleure tournure serait « faire du fendant ».

Faire du lard, Engraisser par l’oisiveté.

Faire la bête pour avoir du son, jouer le rôle de niais ou d’ignorant dans un but d’intérêt.

Faire cinq sous. Une bonne mère : Allons, petit cayon, essuie le raisiné de ta menotte et fais cinq sous à la dame ! C’est-à-dire touche-lui la main. Curieuse locution qui doit avoir quelque bien de parenté avec la légende du Juif-Errant, qui en donnant cinq sous donnait tout ce qu’il possédait.

À quoi le Jean-Pierre passe-t-il son temps ? — À faire des pertuis dans des trous. C’est-à-dire à ne rien faire.

Cette dame a fait fortune dans les draps. Se dit parfois en parlant de personnes dont le commerce a été fructueux.

Faire lumière, Éclairer (les Italiens disent correctement far lume). — Il fait soleil (mais on ne dirait pas « il fait lune » ). Pourquoi ne pas dire « il fait soleil », puisqu’on dit « il fait jour » ?

Faire eccuse. Voy. excuse.

On vous fait à savoir qu’il a été perdu, etc. Ainsi disait le célèbre crieur Larose ; ainsi disons-nous. Et c’est du français très correct, malgré la bizarrerie de la tournure. Seulement il faut remarquer que à savoir est une corruption du vieux verbe assavoir. Comp. « On vous saura à dire ».

Il n’y a que celui qui ne fait rien qui ne se trompe pas. Dicton véridique et que nous répétons toutes et quantes fois que nous avons fait une erreur. La femme d’un de mes amis le surprit un jour avec l’apprentisse. La bonne femme de taper. Que veux-tu, disait le mari avec bonhomie, il n’y a que celui qui ne fait rien qui ne se trompe pas.

Faire, loc. explétive. Pourquoi faire grognes-tu ? — Se met parfois à la fin de la phrase : Pourquoi lui écrivez-vous faire ?

FAITIÈRE, s. f., terme de construction. — Tuiles faitières, Rang de grosses tuiles placées sur le faitage. — Vieux franc. festière, de faîte.

FALLOIR. — Le digne Molerd veut qu’on dise : « Il ne s’en est guère fallu, » au lieu de notre tournure : « Il ne s’en est fallu de guère. » Il fait tort à ses connaissances. « L’un fait beaucoup de bruit qui ne lui sert de guère, » a dit Molière.

FANON, s. m. — Estôme. « Comment voulez-vous que je vous aime, lorsque je n’ai rien dans le fanon ? » disait mélancoliquement mon camarade Picampot à sa colombe. Sur quoi la colombe, qui était poche-grasse chez Mme de Saint-Plumé, de lui donner quelques béatilles, accompagnées de quelques verres de vin. — Je ne serais pas surpris que fanon eût eu d’abord ici la signification de fanal qu’il avait au xvie siècle. Puis le sens serait dérivé à celui de fanon, peau que les bœufs ont sous le menton, et qui, dans l’exprestion actuelle, est prise pour synonyme d’estomac, de gésier.