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Le mot est français, mais je ne l’ai guère vu usité qu’à Lyon, où l’on s’en sert au jour la journée. — De schelling, monnaie des Pays-Bas, qui vaut aux environs de treize sous.

ESCANNER (S’), v. pr. — Décaniller, prendre la poudre d’escampette. Je me suis escanné de la réunion publique avec mon bugne en soufflet d’accordéon et mon panneau en pillandre. — De canne, pris au sens de jambe.

ESCARABILLÉ, ÉE, adj. — « Gai, vif, éveillé, dites escarbillard, arde. » Je tire ceci d’un petit recueil, dressé dans le premier quart de ce siècle, sous le titre de « Lyonnoisismes les plus usités », par Mme Évesque, née d’Arnal, auteur de quelques ouvrages sur l’enfance, et grand’tante de M. R. de Cazenove, à qui je dois la communication du manuscrit. Escarbillard, qui n’est plus français, l’était encore au temps où écrivait Mme Évesque. C’est une légère corruption du vieux français escarbillat qu’on trouve au xvie siècle, avec le même sens, plus celui d’étourdi, de fantasque, et qui est employé par Montaigne. Escarabillé n’est qu’un pur emprunt au provençal escarabilha. Mot français et mot lyonnais sont tombés en désuétude. Je les crois tirés de scarabæus, comme notre escharbot. Comp. l’ital. scarbillare, faire des arpèges, c’est-à-dire bourdonner comme le scarabée. Comp. aussi étourdi comme un hanneton.

ESCARBILLARD, ARDE.— Voy. escarabillé.

ESCARPINS. — Escarpins en peau de bois, Escarpins de Mornant, Sabots.

ESCLOPÉ, ÉE, adj. — Éclopé, ée. Un pauvre homme tout esclopé. — Dans la plupart de nos mots, le préfixe es s’est réduit à é, comme en français. Nous l’avons cependant conservé dans deux ou trois, dont esclopé, espicier.

ESCOFFIER, s. m. — « Vieux terme qui signifie cordonnier, » dit Cochard. Il est aujourd’hui oublié, et même assez inusité déjà au temps de Molard pour que celui-ci n’ait pas jugé à propos de le mentionner. Il signifiait aussi marchand de cuir. — De corium, par une série de transformations trop complexes pour les rapporter.

Escoffier, v. a. — Tuer, spécialement égorger. — De conficere, achever, tuer. Français populaire, particulièrement usité à Lyon.

Il y avait à Feurs la rue de la Cordonnerie, Carreria Escofferiae, ce que M. Broutin, dans son Histoire de Feurs, p. 147, traduit hardiment par rue des Marchands de subsistances.

ESCOFFINE, s. f. — Scie à main. — Vieux franç. escohine, râpe à deux mains ; égohine, scie à main pour les grosses branches. Peut-être d’escot, grosse branche, et d’un verbe haner, qui signifie labourer, et qui a pu prendre le sens de couper, comme en témoigne hanel, doloire. D’où escohane, escohenne, escohine, escoffine. On trouve du reste écouenne.

ESCORLON, s. m. — Algarade, reproches, gronderie. Gnafron : Non, z’enfants, faut s’escanner, la bourgeoise me ferait un escorlon ! (Guignol.) — Ce mot est-il une façon d’estropier escorgeon, escourgée, coups de fouet ?

ESMILLÉ, adj., terme de construction lyonnaise. — Moellons esmillés, Moellons équarris et taillés avec le gros côté du marteau. — De simileare, de similis, parce que ces moellons simulent les moellons piqués. Comp. similor.

ESPADRON, ESPADRONNER pour espadon, espadonner. — Je suis arrivé à trente ans en disant espadron. Cette insertion de r a pour nous un charme particulier. Ainsi badana a fait bardane ; bisbille, brésibille ; maxevole, marnèfle, etc.

ESPÉRER. — J’espère pour Je suppose, J’imagine, avec un sens de satiété ou de commandement. J’espère que voilà assez de remèdes ! J’espère que tu auras bientôt fini ! cette dérivation de sens parait toute naturelle.

Garantir, assurer. J’espère qu’il a l’air bête. Comparez promettre.

ESPICIER pour épicier. — Se dit encore, surtout par manière de rire, mais parfois à la bonne foi. Voy. esclopé.

ESPINCHAUX, s. m. pl. — Argent. Avoir des espinchaux, Être riche. Aboulez les espinchaux, Donnez l’argent. — Rapprochez le vieux franc. espinciau, espinchau, épingle. On aura peut-être trouvé comique