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EMBROUILLAGE, s. m. — Dites embrouillement. Si embrouillage était au dictionnaire (un suffixe vaut l’autre), nous écririons : « Embrouillement, dites embrouillage. »

EMBROUILLAMINI, s. m. — Brouillamini. Les deux so valent puisqu’on dit brouiller et embrouiller.

ÊME (on le fait communément féminin, par analogie avec les mots terminés en e muet, mais il est masculin). — Intelligence, jugement. Mme Pignatet n’était pas contente de son gone : Le Tonius n’a gin d’ême ; si y a un gaillot au mitan du chemin, i met les clapotons dedans ; s’i porte une chandelle, i se bucle le groin ; s’i y a un trou à son mouchenez, i se mouche avè le trou.

Te n’as gin d’ême, va n’en charchi à Trevoux. — Vieille plaisanterie, parce qu’au xviie siècle les liards fabriqués à Trévoux portaient une M, marque de la souveraineté de la maison de Bourbon-Montpensier. — À Lyon, selon Menestrier, « les denrées s’achetaient de deux manières : au poids ou à l’esme ». C’était le cas d’avoir de celui-ci. — Subst. verbal d’æstimare.

EMMALGAMÉ, ÉE, adj. (voy. remettage). — Amalgamé. Le préfixe en étant d’un usage très fréquent, le populaire l’a substitué, par analogie, à l’a imtial plus rarement employé comme préfixe.

EMMALICER, v. a. — Exciter quelqu’un de manière à le mettre en colère, Attiser sa malice. À force de crier ton homme, te l’as emmalicé, et i t’a giflée, pardi. C’est bien fait !

EMMANCHER. — Emmancher une affaire, un mariage, Les faire aboutir.

ENMARGAILLER, EMBARGAILLER, v. a. — Souiller, emplâtrer, spécialement avec une matière malpropre. Le Tonius à Mme Pignatet, quand il mangeait des rôties de mélasse, s’emmargaillait tous les doigts, puis, comme il aimait bien sa mama, il allait l’embrasser, et il emmargaillait sa coiffe. — Vieux franç. margoiller, rouler dans la fange, de marga.

EMMIELLER, v. a. — Euphémisme.

EMPANNON, s. m., terme de charpenterie. — Assemblage de solives ou de chevrons dans une pièce de bois posée en biais sur l’angle de deux murs. — Non, comme le croirait Littré, d’empenner, mais du vieux franç. paner, saisir, fixer ; pan, gage. Empannon est ainsi en relation avec panneau.

EMPARE, s. f., terme de serrurerie. — Penture. — Subst. verbal de emparer, fortifier (comp. rempart), de in-parare. Les empares fortifient la porte, la défendent.

EMPÊCHER À. — Y a de bourrons dans le canon qu’empêch’ à ma loquetière d’entrer. — Faut siffler dedans. Empêcher, suivant Humbert et Grangier, ne prend pas de régime indirect. Mais Malherbe, Corneille, Bossuet, Chateaubriand ont dit empêcher à, et ils valent bien Grangier et Humbert.

EMPEGÉ, ÉE, adj. — Empêtré, embarrassé, gêné par. J’irais bien le voir dimanche, mais je suis empegé par ma femme, que veut que je l’accompagne à Venissieux, chez sa m’man. — De pège. Empegé, retenu comme par de la pège. « Comme une souris empeigée, » dit le bon Rabelais.

EMPEINTE, s. f. — Rame immense à l’arrière des grands bateaux et des radeaux, et qui sert de gouvernail. J’aimerais autant monter une empeinte par un escalier à noyau. Se dit d’une besogne très difficultueuse. — D’impincta, formé sur impingere, pousser, comme pinctus sur pingere.

EMPIRE, s. m., terme de batellerie. — Côté de l’Empire, Rive gauche de la Saône et du Rhône au-dessous du confluent, par opposition au Côté du Royaume, qui est la rive droite. Les mariniers disent communément l’Empi, le Riaume. — Pique au Riaume, Dirige le bateau vers la rive droite. On voit que ces mots ne remontent à rien de moins qu’au xie siècle, alors que le Royaume de Bourgogne faisait partie de l’Empire germanique. Ils ne sont plus employés que dans la batellerie, mais au moyen âge on trouve constamment pour désigner le domicile des citoyens les mots Côté de l’Empire, c’est-à-dire la partie de la ville comprenant Saint-Nizier, etc. ; et Côté du Royaume, c’est-à-dire la partie comprenant Saint-Jean, Saint-Paul, etc.

EMPLÂTRE, s. m. — 1. Gifle. Je te lui ai atousé un emplâtre qui compte au piquet !

2. Se dit de quelqu’un de maladif, qui est constamment à se petouger. Ma femme, quel emplâtre ! Elle à toujours la v… du, etc.