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Nous appelons de même culottes les pantalons, quoique les objets soient différents. M. de Maupassant, dont le style est si ferme et si serré, a suivi notre exemple : « Il avait dès lors supprimé les pantalons de couleur et les vestons de fantaisie, porté des culottes noires et de longues redingotes… » (En Famille.)

Nous avions pour voisine en rue Grenette une bonne femme qui eut le malheur de perdre son mari. Quelque temps après, fouillant dans ses placards, elle trouve une paire de pantalons : Ah, s’écria-t-elle d’un ton déchirant, fondant en larmes, voilà bien les culottes, mais le c… n’est pas dedans !

Il semble que le bon Dieu vous descend dans le gosier en culottes de velours. Voy. Bon Dieu.

CULUIT, s. m. — Femelle du lampyre luisant, vulgo ver luisant. L’épithète est exacte. C’est en effet de cette partie incongrue que le ver luisant jette sa lumière. Il faudra désormais changer le vers célèbre :

C’est du nord aujourd’hui que nous vient la lumière.

Au fig. s’emploie pour désigner une méchante petite lampe, un chelu qui éclaire mal. Comment veux-tu que j’y vo-ye, avè ton culuit ?

CUPELU. — Non fréquemment donné au Puitspelu.

CURAGE, s. m. — Persicaire ou poivre d’eau, polygonum hydropiper. Lisez, parlant par respect, cul-rage. Mon excellent collègue, le docteur Saint-Lager, veut bien me communiquer l’explication que donne de ce mot Matthias de Lobel dans les Stirpium adversaria nova : « Persicaria hydropiper, Gallis Culraige vocatum, ut cujus folia quæ quis podicis (honos sit auribus) abstergendi causa affricuerit, inurant rabiem clunibus, sive ut loquentur Leguleii Culo (ce Leguleii est sublime !) » — À curage, Littré met : « étymol. inconnue. » Tout le monde n’est pas tenu de connaitre Lobel, mais le bon Cotgrave dit expressément : Culrage, as curage, the herb Water-pepper Arsemart (on sait que arse = podex et smart, cuisson), Killridge ou Culerage, — Le sage Rabelais met la « persiguiere » au nombre des herbes dont il faut éviter de se servir lorsqu’on se trouve à la campagne, à peine d’avoir la « cacque sangue de Lombard ».

CURAILLE, s. f. — « Le milieu d’un fruit dont on a ôté ce qui est bon ; dites trognon. » (Molard.) — D’après l’Acad. trognon a deux sens : 1° tige de chou, etc. ; 2° milieu d’un fruit. Lyon ne voulant pas d’équivoques, a deux expressions. Sans compter que trognon, de trogne, nez, n’a absolument rien à faire avec l’intérieur d’un fruit. L’utilité de cette distinction se marque d’une manière frappante dans le sermon du bon chanoine aux mariages dotés (10 avril 1810) : « Faites comme le bon profête Grignole, qu’aimit mieux laissé manger ses joyes par les bardanes, plutôt que de succombé z’à la tentation du péché de la chaire, et que, s’escannant d’un monde corrompu, a vivu trois ans dans une île desarte, rien que de trognons de salade et de curailles de pommes. »

CURE-OREILLE, s. m. — 1. Forficula auricularia. Dans certains pays on s’imagine sottement qu’il perce les oreilles, mais nous savons qu’il se contente de les nettoyer avec soin.

2. Petit instrument d’ivoire ou d’os, en forme de cuiller, qui sert à enlever le cérumen. J’ignore son nom français.

CURET, s. m. — Vidangeur. Ce mot, tombé en désuétude, a été généralement remplacé, parlant par respect, par celui de gandou. Au xviiie siècle, les Curets formaient une compagnie célèbre. On les aimait, parce que leur voisinage assurait la sécurité mieux que la Compagnie du Guet. Ils avaient du reste un mot de passe, et quand on leur criait : « Curets, quelle heure est-il ? » ils répondaient par un mot dont la première lettre est effacée dans mon exemplaire des Lyonnais dignes de mémoire, et dont il ne reste que erda. Je suppose que c’est de l’allemand, et qu’il s’agit du cri des Prussiens : wer da. — De curer, manquablement.

CURIEUX. — Vous êtes curieux comme un confessionnal, dit-on à un indiscret.

CUTI, IE, adj. — Se dit des cheveux agglomérés (voy. s’acutir). Au lendemain ma-