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velles, je suivis la bonne femme jusqu’aux Sablonnières. Avec précaution, de crainte que l’une des deux blessées ne fût endormie, je montai par l’étroit escalier de bois qui menait au premier étage. Et là, M. de Galais, le visage fatigué mais heureux, me fit entrer dans la chambre où l’on avait provisoirement installé le berceau entouré de rideaux.

Je n’étais jamais entré dans une maison où fût né le jour même un petit enfant. Que cela me paraissait bizarre et mystérieux et bon ! Il faisait un soir si beau — un véritable soir d’été — que M. de Galais n’avait pas craint d’ouvrir la fenêtre qui donnait sur la cour. Accoudé près de moi sur l’appui de la croisée, il me racontait, avec épuisement et bonheur, le drame de la nuit ; et moi qui l’écoutais, je sentais obscurément que quelqu’un d’étranger était maintenant avec nous dans la chambre…

Sous les rideaux, cela se mit à crier, un petit cri aigre et prolongé… Alors M. de Galais me dit à demi-voix :

— C’est cette blessure à la tête qui la fait crier.

Machinalement — on sentait qu’il faisait cela depuis le matin et que déjà il en avait pris l’habitude — il se mit à bercer le petit paquet de rideaux.

— Elle a ri déjà, dit-il, et elle prend le doigt. Mais vous ne l’avez pas vue ?

Il ouvrit les rideaux et je vis une rouge petite