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quotidiens ou premières pages de ces suppléments illustrés et grossièrement coloriés qui pénètrent aujourd’hui partout. Le logis n’avait qu’une pièce, meublée sommairement d’un lit-clos, de deux armoires, d’une table et d’un banc. Pour plancher, de la terre battue. Aux poutres brunies de fumée, quelques tranches de lard, le fléau d’une balance ; dans le retrait de la croisée, entre deux bouquets de papier peint, un petit autel avec une sainte Anne et la Vierge et, au-dessus, la photographie de Victor Hugo.

— Et Luzel ? demandai-je.

Aotro Luzel ? corrigea Marguerite. Oh ! je n’ai pas besoin de voir son portrait. Il est gravé là, — et elle m’indiqua son cœur.

— Vous l’aimiez donc bien ?

— Il était si bon pour moi ! Chaque année il m’envoyait 10 francs d’étrennes et, quand je me déplaçais pour l’aller trouver à Keramborgne, il m’hébergeait, me nourrissait et me donnait encore un petit écu.

— Est-ce vrai ce qu’il dit, Marguerite, que vous savez de mémoire 100 contes et 200 chansons ?

Aotro Luzel n’a point exagéré ; il serait au-dessous de la vérité plutôt. Tenez : je vais vous montrer mon « cahier ». Je n’ai point été à l’école, mais une voisine, la fille de Charles Guyomard, s’est prêtée complaisamment à transcrire sous ma dictée les gwerz et les sônes que je connais par cœur. Il y en a 259…

J’ouvris le « cahier »[1] et choisis au hasard trois

  1. Le « cahier » de Marguerite n’est point terminé et il serait bien à désirer qu’il le fût et acquis par une de nos