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Luzel est présent partout à Keramborgne. Pour révoquer, si nos souvenirs défaillaient, il suffirait de ses sœurs Perrine, Séraphine et Marivonne, triade vénérable, obstinément fidèle à sa mémoire et au foyer domestique : telles ces vieilles fées débonnaires préposées, dans les légendes, à la garde d’un « dormant » mystérieux. Le père de Luzel, vétéran du premier Empire[1], avait eu dix enfants. Des quatre qui survivent, trois filles et un garçon, notaire dans un canton voisin, nous ne retiendrons que Mlle Perrine. Si sa modestie l’empêcha de figurer en nom dans l’œuvre de Luzel, il n’est que juste, à cette heure, qu’on lui restitue la place qu’elle y devrait occuper. En même temps que la confidente de la pensée fraternelle, Perrine fut l’intermédiaire de son frère près du peuple, et il n’est pas exagéré de dire que l’auteur des Veillées bretonnes dut à ses recherches personnelles, à son intelligence toujours en éveil, quelques-uns des plus beaux épis de sa gerbe poétique.

— Quand un gwerz ou une sône manquait à sa collection, il m’écrivait, me disait Mlle Perrine, et ne me laissait point en repos que je ne me fusse mise en campagne pour les lui trouver. Que de peine j’ai eue ainsi pour me procurer le gwerz de Jeannette Le Guern ! On m’indiqua enfin une vieille femme, Môn-ar-Bricquir, qui habitait Plouaret et qui savait ce gwerz. Je l’allai trouver : elle me reçut fort aimablement, m’offrit une tasse de café ; mais, quand je la priai de me

  1. Racheté trois fois, il avait été compris en 1813 dans la levée générale.