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frennou[1], les échos de la langue française ne résonnent jamais ou presque jamais ; les traditions primitives s’y perpétuent, ainsi que les naïves superstitions d’un autre âge. Attachés à leur sol natal, ces hommes des landes, sous de rudes dehors, sont les plus doux et les plus hospitaliers des Bretons. »

Souvestre avait déjà noté le fait et rappelé ce vieux rite de l’hospitalité cornouaillaise : la boisson de bienvenue versée dans un pichet commun que le chef de maison tend à son hôte après y avoir bu le premier.

Mais c’est à sa conception du divin qu’on peut mesurer le mieux le degré d’élévation morale de ce peuple. Religieux, certes les Cornouaillais le sont autant et plus peut-être que leurs compatriotes des basses terres ; mais leur religion ne s’épanouit point au dehors ; elle est sobre de démonstrations, comme toutes les religions qui ont leur point d’appui dans la conscience. Et peut-être aussi qu’elle se souvient confusément de ses lointaines origines pramanthiennes. « Tant que le feu ne sera pas éteint à mon foyer » est une des locutions favorites de ce peuple : comment ne pas voir là une survivance du passé, du temps où le feu était pris pour symbole de la famille, où l’âtre servait d’autel et se confondait avec le dieu qu’on y honorait ?

Ce culte du foyer, qui s’associe au culte des morts dans toutes les religions primitives et qui fut peut-être fondé sur lui, comme Fustel de Coulanges incline à le

  1. Cf. La vie de famille dans les Montagnes-Noires, par François Jaffrennou (Aubert, Le livre de la Bretagne).