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Dixisti, répondis-je dans la langue de Jules César. Sur quoi l’excellent homme fit deux nouveaux pas en avant, me saisit la main, lui imprima une terrible secousse verticale et tourna sur ses talons comme un automate.

Je n’essayai point de le retenir. Il faisait un clair soleil d’été ; mais les brumes légères qui montaient de l’Usk tamisaient les lointains et leur donnaient une imprécision, un vague délicieux. C’est Amiel qui a dit qu’un paysage n’est qu’un état d’âme. Je n’ai jamais mieux compris la profondeur de ce mot : le paysage était vraiment ici de la nuance exacte de mon émotion et, avec quelque complaisance ou un peu plus de naïveté, j’aurais pu voir comme une complicité des choses dans cette soumission de la nature au trouble de mes sentiments…

Je m’étais tracé un itinéraire qu’il m’était d’autant plus aisé de suivre qu’avec une bonne grâce parfaite l’instituteur principal de Caerléon avait bien voulu se mettre à ma disposition. Je l’avais trouvé à table, pendant que son petit peuple d’écoliers s’ébattait dans les préaux et les salles. Ce me fut une assez forte surprise que celle de ces enfants ainsi livrés à eux-mêmes, à qui les plus grands servaient de moniteurs et qui ne profitaient point de l’absence du maître pour « chambarder » l’établissement. Je cherchais partout ce maître : les deux écoles de garçons et de filles occupent des bâtiments voisins (de style néo-gothique, bien entendu), et je pus les visiter l’une après l’autre sans que personne me fît d’observation.

Les salles surtout me frappèrent par leur nombre,