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répondrai par le mot d’Hamlet : « Il y a dans le ciel et sur la terre, ô Horatio, plus de choses que n’en peut rêver notre philosophie. »

— Mais à quoi riment ces apparitions ? demandai-je.

— Je ne sais, me répond lady Herbert. Tantôt, comme l’Église nous l’explique, ce sont des âmes en peine qui sollicitent la pitié des vivants oublieux. Tels autres de ces spectres font le rôle d’avertisseurs. C’est le cas, je crois, pour la dame noire de Windsor. Sa présence dans le château annonce toujours quelque grave événement, une guerre, une catastrophe prochaine. Mais il n’est pas besoin de fantômes. Les avertissements ou, comme vous dites en Bretagne, les intersignes, revêtent toutes les formes. Quelquefois ces formes sont spéciales à certaines familles. Les Grey de Ruthwen sont avertis de la mort de leurs membres par l’apparition d’une voiture à quatre chevaux noirs, La famille Airl, quand un des siens est sur le point de mourir, entend un roulement de tambour. Dans un diner auquel assistait un de ces Airl, on demandait par passe-temps : « Quel est donc l’intersigne de votre famille ? — Le tambour. » Et, comme pour attester le fait, un roulement sourd et voilé gronda dans le lointain. Lord Airl pâlit : quelques instants après, un messager venait lui annoncer qu’un des membres de sa famille était mort. Les Mac-Gwenlyne — descendants du célèbre clan de ce nom — possèdent depuis des siècles, dans le nord de l’Écosse, le vieux manoir de Fairdhu : une grande voûte cintrée y donne accès et l’on prétend que la pierre qui sert de clef à cette voûte se met à trembler quand un Mac-Gwenlyne va mourir…