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vent qu’elles étaient justifiées, furent toujours entendues. Flamands et Normands ont le verbe haut à la vérité ; ils « savent se plaindre » et même, à l’occasion, menacer.

Le Breton, lui, se tait, et son silence est interprété pour une acceptation.

Acceptation ? Non, mais résignation, soumission — provisoire — à un ordre de choses que sa naïveté lui fait prendre pour une fatalité économique. La nuance est appréciable. Le Breton ne lutte jamais contre la fatalité. Que cet esprit de résignation soit inné en lui ou qu’il lui vienne d’un long commerce avec la mer et du sentiment de son impuissance devant les obscures et irrésistibles forces naturelles, le fait est qu’il ne récrimine pas, ne se révolte pas, s’incline, se tait, dès qu’il croit être en présence de l’inévitable.

Ouz ar red…
N’euz nemet kouci a greiz redek.

« Contre la nécessité (rien à tenter) ; il faut tomber au milieu de la course ».

Cette résignation-là ressemble fort, je le concède, au fatalisme musulman. Elle a trouvé dans un catholicisme primitif, mal dégagé du vieux naturalisme celtique, le terrain le plus propre à son épanouissement. Peut-être que le nom qui conviendrait le mieux à ce catholicisme serait celui de paganisme chrétien. Telle est bien encore la religion du paysan et du ma-