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Robert, enseigne de vaisseau, — le prend à ce moment de sa vie où il se sent mûr pour un rôle politique. Les extraits qui suivent sont précieux à plus d’un titre ; ils font bout à bout une galerie assez piquante des tribulations d’un candidat en l’an de grâce 1846 ; ils renseignent sur l’état des partis, sur les hommes, sur les mœurs, et ne sont point indifférents pour la connaissance de Jules Simon lui-même.

« Vous ne savez peut-être pas, écrit-il à son correspondant, quelques mois avant les élections générales de 1846, que j’ai, dans une partie de l’Université, la réputation de parler assez bien. Mes amis pensent depuis longtemps que j’arriverai à être député et que j’y songe. Non seulement on m’a fait dans une ou deux villes des ouvertures qui ne m’ont pas paru assez sérieuses ; mais, ici, plusieurs de mes amis, M. Villemain entre autres, m’en ont parlé et ont parlé de moi en ce sens. En Bretagne, toute la Faculté des lettres de Rennes est persuadée que je ne pense pas à autre chose ; et Dufilhol[1], qui m’a

  1. Recteur de l’Académie de Rennes, où, comme proviseur du lycée et ami de la famille de Jules Simon, il avait appelé celui-ci, à sa sortie du collège de Vannes, en qualité de maître-répétiteur, Louis-Antoine Dufilhol (1791-1864) est l’auteur de ces Études sur la Bretagne qui précédèrent les Bretons de Brizeux et les Derniers Bretons de Souvestre et ne furent peut-être pas étrangères à la vocation de l’un et l’autre de ces écrivains. Mais son œuvre principale, parue sous le pseudonyme de L. Kerardven, est une « chronique bretonne », Guionvac’h (1835) dont les exemplaires sont aujourd’hui de la plus extrême rareté ! Guionvac’h, remis par Dufilhol à Jules Simon, fut édité par l’intermédiaire de celui-ci, chez un certain Ebrard, « qui était