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toucherai par mois, je t’enverrai 90 francs. Avec cet argent, tu vas venir à Brest suivre les cours de médecine navale. »

C’était un jeune homme de dix-huit ans, presque un enfant, qui, sans que personne l’en eût sollicité, de lui-même, disposait ainsi de sa solde d’aspirant : deux tiers pour son cadet, un tiers pour lui, et l’on comprend l’émotion de M. Tual en transcrivant une pareille lettre. Quelle bonté, quel désintéressement, quelle noblesse d’âme elle supposait chez le petit officier ! Quelle admirable solidarité avec les membres de son clan ! Grâce à la pension que lui servait son frère, Louis Koun put suivre à Brest les cours de médecine navale et, deux ans plus tard, il était reçu en bon rang à l’École de Bordeaux.

— Encore un de débrouillé, dit Jobic. Passons au suivant !

Et l’enseigne venait de prendre ses dispositions pour aider son troisième frère, dont il voulait faire un mécanicien de la flotte, comme il avait fait du second un médecin de la marine…

Lui aussi avait compté sans les Faces Jaunes.

Je m’arrête bien à contre-cœur. J’aurais voulu suivre M. Tual dans son pèlerinage à la maison de Baden où il nous peint le père de Joseph Koun, précocement vieilli par la souffrance, la tête dans les mains, pleurant éternellement son pauvre Jobic ».

Pour intime et profonde que soit la douleur de ce