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pièce, il acheta une pipe, des bottes neuves, un gilet en poil de chèvre et dîna pour la première fois chez le père Lafitte, au restaurant où fréquentaient ses camarades plus fortunés.

Vrai miracle qu’il ne se soit point gâté la main à ces pieuses acrobaties ! Mais, au contraire, on le voit qui s’affirme de jour en jour, qui dégagée lentement, mais sûrement, sa fine personnalité artistique. Jusqu’en 1848, pourtant, Hamon n’avait pas encore trouvé sa manière, son style propre. Ce fut un hasard qui les lui révéla, comme à Puvis de Chavannes, plus tard, un hasard devait révéler le secret de la décoration murale.

Hasard ? Encore faut-il s’entendre. Combien d’hommes, jusqu’à Newton, avaient vu tomber une pomme qui n’avaient point été conduits à réfléchir sur les lois de l’attraction ? L’un des mots les plus vrais qu’on ait dits du génie, c’est qu’il n’est qu’une longue patience. À quelqu’un qui s’étonnait de la soudaineté de sa découverte et lui demandait par quelle voie il s’y était acheminé, Newton répondit profondément : « En y pensant toujours ». Hamon aurait pu répondre comme Newton. Le Musée de Sèvres lui avait confié l’ornementation de deux grands vases pompéiens : à la vue de ces sveltes amphores, au palper de leurs lignes harmonieuses, Hamon tressaillit et se connut tout entier. La forme des vases lui imposait son thème : il peignit sur l’un une ronde grecque, sur l’autre les mois de l’automne et du printemps. Le naturel, la grâce exquise, la langueur délicieuse de ces compositions frappèrent