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ment dit, ces hybrides, trop européens, cessaient de résister au phylloxéra, ennemi alors absolument inconnu des viticulteurs, quoique déjà trouvé mais pas encore mesuré, comme conséquences, par le professeur Riley. Ceci se passait peu de temps avant l’arrivée en Amérique, de M. Planchon. À partir de ce point et de la rencontre des professeurs Planchon et Riley, la France et l’Amérique, aussi effrayées l’une que l’autre, marchèrent de conserve. Parfois elles se font des politesses sous la forme d’imitations rétrospectives, et d’autant plus retardantes que les distances et les lenteurs de traductions, rendues nécessaires par l’ignorance très générale de la langue française, font fleurir des théories françaises au moment où, ayant trouvé mieux, on les quitte en France.

Autre exemple de ces échanges si nuisibles. Dans tous les livres américains, antérieurs à l’échange d’idées et de pratiques que je signale plus haut, on lit que le meilleur plant pour tous les usages est la bouture à un œil. En ce moment, après une longue, illogique et surtout paresseuse hésitation, voilà le mouvement français qui s’engage pendant qu’il s’arrête en Amérique, où le procédé bénéficiait de tous les avantages qui s’attachent au fait d’avoir depuis longtemps passé dans la pratique générale, uniquement parce que ce procédé n’était pas courant en France. Il est probable que son titre de best plant for all purposes tenait au même motif, qui, dans les terrains difficiles, le fera adopter en France : soit un racinage superficiel lui permettant de vivre dans la couche arable sans faire d’emprunt au terrain inférieur.

Nous voilà arrivés à la grande question du moment, le racinage superficiel.

Cette année a fait un progrès aussi grand qu’imprévu dans cette direction que, depuis quelque temps, je signalais avec autant de timidité que d’insistance, si toutefois ces deux mots ne s’effrayent pas de se trouver ensemble. Je les risque, car ils disent exactement ce que je veux dire, soit que j’avançais timidement mon idée, parce que je savais par expérience combien elle rencontrerait d’oppositions, mais que je la maintenais avec insistance parce que plus je l’examinais, plus je voyais en elle une forme rapide et plus physiologiquement raisonnable d’obtenir les avantages conquis jusqu’ici dans les terrains difficiles par les provignages constants.

Les deux congrès d’octobre ont surtout été saisis de cette question des racines superficielles, puis de celle des maladies cryptogamiques, le black-rot et le conyothirium diplodiella ayant semé dans nos rangs une juste et très nouvelle terreur. La greffe de Cadillac a eu une bien plus large part qu’elle n’avait eue à Bordeaux, l’année précédente. Nul n’est prophète dans son pays, c’est le cas