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durent remonter le long des parois du trou. Ce fut là qu’on constata le cas le plus foudroyant. À la première visite en 1868, il n’y avait que très peu de morts sur ces 100 hectares, âgés de trois et quatre ans. En 1869, pas une souche n’était vivante ; outre qu’en cet endroit, la plantation était faite sur un défrichement de chêne, le voisinage de cet arbre était immédiat. On s’était déjà aperçu depuis un temps que je ne puis préciser, que les plantations sur défrichements récents de chesnaies réussissaient mal. Mais de là à rattacher ce fait à l’invasion et à attribuer au phylloxéra un changement en sa personne anatomique en vue de ce déménagement, il y a toute l’épaisseur séparant une vue de l’esprit d’une étude suivie et passée dans la pratique usuelle. En 1869 se place le premier congrès viticole ayant trait à la crise qui prenait une intensité déjà effrayante pour qui savait voir et prévoir. C’est à ce congrès que M. Laliman acquit si justement tous ses droits à une reconnaissance encore très vivante, quoique son titulaire ait pris plaisir à en embrouiller et masquer les motifs par une série de paradoxes, de polémiques et de revendications vraiment triées sur le volet de la contradiction quand même ! Ainsi, il ne veut pas avoir apporté le phylloxéra, mais non seulement il tient et cela à bon droit, à être un des premiers importateurs de la vigne américaine, mais il veut être le seul, ce qu’il est impossible de lui accorder. En dehors des importateurs de Roquemaure, en 1863, nous avions depuis longtemps quelques vignes américaines en France, notamment aux anciennes pépinières du Luxembourg, etc.

Au point de vue de l’extinction réelle, l’espoir fut vite éteint chez les clairvoyants ; on dut chercher les moyens de faire vivre les vignes malgré le phylloxéra, et à côté de lui.

En 1879, le congrès viticole de Nîmes fit faire un pas dans la carrière, et les grandes lignes de défense s’y posèrent. Je ne parle pas des retardataires comme M. de Janzé qui ne connaissent pas du tout la question ; mais, parmi ceux qui s’en occupaient le plus sérieusement, on était loin d’être fixé sur la foi à accorder à la vigne américaine, ni sur la valeur relative des différents moyens de reconstitution. Entre les quatre systèmes en présence se déchaînèrent bien des orages. On dit que quand il n’y a plus de foin au râtelier, les chevaux se battent. Mon expérience est moins exclusive et me montre autant et plus de batailles devant un butin désirable qu’autour de la disette. C’est ce que l’on vit à Nîmes, et la vigne américaine sortit un peu plus forte de la discussion qu’elle n’y était entrée, quoique certains loustics aient trouvé joli de rire et d’éteindre ainsi les falots dont le docteur Despetis voulait si intelligemment et pratiquement éclairer la