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DE LA VIE DE MAHOMET.

collier retrouvé, je retournais joyeuse à l’endroit où j’avais laissé ma voiture. Il ne s’y trouva personne. J’appelai ; on ne me répondit point. Je remplis l’air de mes cris ; ils ne furent point entendus. J’espérais qu’on viendrait me chercher ; mon espoir fut déçu. Fatiguée de crier et d’attendre, je m’assis, et le sommeil s’empara de mes sens. Sawan, qui partagea mes malheurs, était resté à l’arrière-garde. Il passa de grand matin près du lieu où je reposais. M’ayant aperçue sans voile, il me reconnut. Je m’éveillai en l’entendant parler. Nous sommes les enfans de Dieu, disait-il, et nous retournerons à lui. J’atteste le ciel qu’il ne me tint aucun autre discours. Je me couvris d’un voile. Il fit approcher son chameau, m’aida à y monter, et le conduisit par la bride jusqu’à ce que nous eûmes rejoint l’armée. » Aïesha plaida sa cause devant son époux, devant Abubecr et Om-Rauman, son père et sa mère. Elle était jeune, jolie, éloquente : elle persuada. Mahomet, qui l’aimait tendrement, fut charmé de la trouver innocente. Ne voulant laisser aucun doute sur sa conduite, aucun nuage sur sa réputation, il fit descendre le chapitre vingt-quatrième du Coran, où ces versets la justifient pleinement.

« Lorsque vous avez entendu l’accusation, les fidèles des deux sexes n’ont-ils pas pensé intérieurement ce qu’il était juste de croire ? N’ont-ils pas dit : Voilà un mensonge impudent[1] ? »

«[2] Si la miséricorde et la bonté divine ne veillaient sur vous, ce mensonge eût attiré sur vos têtes un châtiment épouvantable. Il a passé de bouche en bouche. Vous avez répété ce que vous ignoriez, et vous avez regardé une calomnie comme une faute légère ; et c’est un crime aux yeux de l’Éternel, etc. » L’oracle divin ayant


  1. Le Coran, chap. 24, p. 99.
  2. Verset 14, p. 100.