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ABRÉGÉ

tinua un autre, je ne combattrai point tes argumens ; car si tu es véritablement l’apôtre de Dieu, ton caractère est trop auguste pour qu’un mortel ose disputer contre toi ; et si tu es un imposteur, tu ne mérites pas que je te réponde ». Mahomet garda le silence, et sortit de l’assemblée. Quelques Takifites, plus raisonnables, lui firent un meilleur accueil ; mais le peuple, dont il avait combattu les divinités, se déchaîna contre lui, et il fut chassé de la ville. « Dieu suprême, s’écria-t-il en quittant Taïef, les insensés vont t’attribuer ma faiblesse, l’impuissance de mon zèle, et l’opprobre dont ils m’ont couvert. O toi, dont la miséricorde est sans bornes ! tu es le seigneur des faibles, tu es mon seigneur. Que ta colère n’éclate pas contre moi, si l’homme superbe a dédaigné de m’entendre ! » Il retourna à la Mecque, où il arriva le 23 du mois elcaada[1].

Ces disgrâces ne lassaient point sa constance. Elle était au-dessus des revers. On célébrait les fêtes du pèlerinage[2]. Ces solennités attiraient à la Mecque un grand concours de peuple. Mahomet employait ce temps à prêcher contre l’idolâtrie. Sur les chemins, dans les places publiques, partout il élevait sa voix contre les faux dieux. « Enfans de telle tribu, criait-il aux diverses familles arabes, je suis l’apôtre de dieu[3] ; il vous commande de l’adorer, de ne point lui donner d’égal, de retrancher de son culte tout ce qui n’est pas lui, de croire à ma mission, et d’en attester la vérité ». Cette hardiesse avec laquelle il osait combatre les idoles au milieu de leurs adorateurs,


  1. Jannab.
  2. Le pèlerinage de la Mecque était établi long-temps avant Mahomet. Les Arabes y venaient célébrer la mémoire d’Abraham et d’Ismaël : ce n’était qu’un usage. Le législateur en fit un précepte.
  3. Abul-Feda, page 30.