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ABRÉGÉ

fit naître des différens entre les tribus[1]. Chacune voulait avoir l’honneur de la poser à sa place. Après bien des débats, on convint de s’en rapporter au jugement du premier qui entrerait dans le temple. Le hasard y conduisit Mahomet. On le choisit pour arbitre. Il décida qu’il fallait placer la pierre noire sur un tapis étendu ; qu’un homme de chaque tribu en tiendrait les extrémités, et qu’ils l’élèveraient tous ensemble. Lorsqu’elle fut suffisamment exhaussée, Mahomet la prit de ses propres mains et la mit à sa place. On acheva l’édifice, et on le couvrit de tapis magnifiques.

Rendu à ses occupations pacifiques, Mahomet s’étudiait à contenter son oncle Abutaleb. Il était à la fleur de l’âge. Sa probité et son esprit faisaient du bruit. Cadige, veuve riche et noble en entendit parler. Elle descendait comme lui de l’illustre tribu des coreïshites. Elle faisait un commerce étendu, et avait besoin d’un homme intelligent pour le conduire. Elle jeta les yeux sur Mahomet, et lui offrit des avantages considérables, s’il voulait se charger de la direction de ses affaires[2]. Il y consentit sans peine, et partit pour la Syrie où les intérêts de Cadige demandaient sa présence[3]. Maïsara, domestique de cette dame, l’ac-


  1. Abul-Feda, page 13.
  2. Idem, page 12.
  3. Au rapport de Maïsara, cité par Jannab, dévot musulman, ce voyage fut fécond en merveilles. Tout le temps que le voyageur protégé du ciel traversait les déserts brûlans de l’Arabie, un ange étendant ses ailes le mettait à l’abri des rayons du soleil. Il marchait sous cet ombrage miraculeux. À Bosra, s’étant assis sous un arbre desséché, l’arbre reverdit, se couvrit de feuilles et de fleurs. Ce prodige opéré en présence de Nestor et de Bahirar, ces deux moines au sujet desquels les modernes ont débité tant de fables, les convertit, et ils reconnurent Mahomet pour prophète. Jannab.

    Ces miracles, attestés par un domestique, n’en ont point imposé au savant Abul-Feda, qui, quoique musulman, n’a pas voulu faire de la vie de son prophète une mauvaise légende.