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. - On prétend que c'est Pezr Guillou, de Lok-Mikel. Elle se rappela qu'elle avait connu ce Pezr, autrefois, sur les bancs du catéchisme. Mais que lui avait-elle donc fait pour qu'il la maltraitât si injustement ? Car ce n'était qu'un tissu de menteries, cette gwerze. Elle ne savait pas, la pauvre fille, que fabricants de complaintes et faiseurs de vers se jouent, par vocation, au milieu d'un perpétuel mensonge. - Mais, continua le gamin, Pezr Guillou n'a pas tout dit. - Qu'aurais-tu voulu de plus ? - Il n'a pas dit que le vieux seigneur de Keranglaz promet dix arpents de terre labourable à qui lui livrera vivante la Charlézenn... Maintenant, s'il vous plaît, donnez-moi mon écu !

C'est vrai, elle avait promis un écu à cet enfant. Où le prendre ? Certes, ce n'était pas l'argent qui manquait chez les Rannou. Mais, retourner là-bas, jamais !... Il lui vint une ispiration soudaine. Après tout, qu'importait le genre de mort ! Tous les chemins mènent à Dieu. - Ce n'est pas un écu que je veux de donner, mais dix, vingt, soixante écus, cent peut-être. Seulement il faudra que tu m'accompagnes jusqu'au château de Keranglaz où l'on m'attend et dont le seigneur te paiera, en mon nom. Tous deux prirent un sentier, sur la gauche, franchirent la rivière du Roscoat, sur le pont de planches, et, au bout de longues heures, se trouvèrent enfin dans la cour du manoir. En entendant aboyer les chiens de garde Keranglaz le vieux sortit. C'était un grand vieillard, tout de noir vêtu. Depuis le trépas de son fils aîné, il n'avait pas quitté le deuil. Gaïd Charlès savança vers lui, tenant par la main son petit compagnon. Et, ayant