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de rien. - Dis-moi ta peine. Approche-toi. Il se traîna jusqu'à elle, en rampant, comme un chien qui a peur d'être battu. - Est-ce peine d'esprit ou peine de cœur ? Je veux que tu me le dises. - C'est peine de cœur, Gaïdik. Tu devines toutes choses. Tu es une sorcière, comme la vieille Nann, seulement tu est une sorcière du bon Dieu, toi. - N'essaie donc pas de me rien cacher. - Aussi bien j'aurais déjà dû te le dire. Voilà, Gaïdik. Je t'aime follement. Veux-tu que nous soyons mari et femme ?

Il avait fallu qu'il prît son courage à deux mains, le pauvre Kaour, pour proférer ces mots si simples. Et maintenant il attendait, la face collée contre la terre, que la Charlézenn parlât. La Charlézenn gardait le silence. Kaour releva la tête. Sur ses traits, une angoisse infinie était peinte. - Gaïd, murmura-t-il, tu ne veux point, n'est-ce pas ? - Non, Kaour, décidément non ! - Tu aurais répondu : "Oui", Gaïd, si au lieu d'être Kaour, j'avais été Kirek ou Guennolé... - En cela tu te trompes. - Tu préfères cependant l'un de nous ? - Tu me poses des questions bin étranges auxquelles je n'ai jamais réfléchi. La vérité est que je vous préfère tous trois. - La vérité vraie, Gaïdik ? - La vérité vraie, Kaour ! - Puisque c'est ainsi, je ne pleurerai plus. Je souffre déjà moins. Tu jures que tu ne seras la femme de personne