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? Viens !... Tout ce que tu désireras, tu l'auras. Si tu tiens aux parures, nous t'en rapporterons de superbes à rendre jalouse Notre-Dame de Rumengol qui cependant a une robe en or. Nous t'aurions déjà fait cette proposition depuis longtemps, mais nous ne l'osions, pensant que tu ne te déciderais par à quitter la vieille Nann, ta mère-nourrice... - Oh ! celle-là est une misérable sorcière ! s'écria la jeune fille.

Tout d'abord elle n'avait écouté les paroles de Kaour qu'avec ennui, le front plissé, l'air méfiant et sombre. Mais peu à peu elle y avait pris intérêt. Finalement, à l'idée de vivre parmi ces hommes simples, dans la grande forêt pacifique et profonde comme une église immense, son cœur s'était fondu. Son navrement de tout à l'heure était déjà loin d'elle. Elle pleurait silencieusement, sans amertume. - Tu as raison de pleurer, Gaïdik, dit alors Guennolé. Cela te soulagera. Nous allons attendre un peu plus bas que tu aies pris un parti. Si tu descends de notre côté, c'est que tu auras accepté la proposition de Kaour. - C'est cela ! opinièrent Kaour et Kirek. Et tous trois se retirèrent à l'écart, sans toutefois perdre de vue la Charlézenn.

Celle-ci resta quelque temps encore debout sur la plate-forme du rocher, le dos appuyé à l'arbre de la croix. Mais ce n'était plus la mer qu'elle regardait. Ses yeux limpides, d'où les larmes coulaient doucement comme une averse printanière, ses yeux couleur de ciel d'avril suivaient à l'horizon la ligne onduleuse des bois. Le soleil venait d'apparaître. Une pluie d'or s'égouttait au loin, ruisselait en lumineuses cascades sur tout le versant, des cimes les plus éloignées aux fronda