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savez comme les gens de la campagne sont peu exacts. Père et matrone, parrain et marraine flânent en chemin, s’attardent aux auberges, s’il y en a sur la route, n’arrivent au bourg que longtemps après l’heure convenue. Le prêtre s’est lassé de les attendre vainement ou a été appelé par quelque autre devoir de son ministère. Nos gens se rendent au porche, trouvent l’église déserte. À leur tour de s’y morfondre. Il n’y fait pas chaud. L’enfant crie. La matrone, la groac’hann-holenn (la vieille-au-sel), déclare que si l’on reste là, le nouveau-né risque « d’attraper sa mort. » On gagne quelque endroit mieux abrité, l’auberge la plus voisine. On y patiente, en vidant chopine, jusqu’au retour du prêtre. L’enfant a passé au cimetière, terre bénite, et en est sorti sans avoir été fait chrétien. Il aura le don de voir.

« L’aventure se produit souvent. De là vient que tant de Bretons ont la faculté de voir ce qui reste invisible aux yeux de la plupart des hommes. »

(Communiqué par René Alain, garçon de bureau aux Archives départementales, ancien chantre à Penhars. – Quimper.)

Ont encore le don de voir ceux qui possèdent le trèfle à quatre feuilles, l’épi à sept têtes, ou le grain qui a passé dans la meule sans être moulu et au four sans être cuit.