Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/58

Cette page a été validée par deux contributeurs.

point d’origine humaine, une sorte d’esprit méchant qui hante les grèves et fait périr les pêcheurs.

Ce n’est pas seulement sur les chemins qu’on est exposé à de dangereuses rencontres ; les morts vont parfois jusque dans leur demeure chercher les vivants. C’est ainsi que René Pennek, qu’un arbre a écrasé, vient en pleine nuit chercher sa fiancée qui le croit vivant encore ; il la prend sur son cheval, l’entraîne au cimetière ; la couche nuptiale de la jeune fille, ce sera la fosse fraîche où l’âme jalouse l’enferme avec elle. Il est à peine besoin de faire remarquer que c’est le thème même de la ballade de Lénore, dont il existe des variantes dans presque tous les pays d’Europe[1]. Un jeune homme dont le rival s’est pendu par désespoir d’amour, invite à son repas de noces le cadavre de son ami, qui pourrit accroché aux bras d’une croix de pierre ; le mort se rend à l’invitation et vient s’asseoir hideux et terrible parmi les convives.

L’Ankou lui aussi s’asseoit à la table des vivants ;

  1. V. Bonet-Maury, G. A. Burger et les origines anglaises de la ballade littéraire en Allemagne, p. 138-154 et 238-274. L’appendice renferme les divers parallèles de la ballade de Lénore, l’un d’eux, le Frère de lait, est emprunté au Barzaz-Breiz. Voir aussi J. Psichari, La ballade de Lénore en Grèce, in Revue de l’Histoire des Religions (1884).